Le 4 aout, on a procédé à l’inauguration de la nouvelle murale en hommage à Ron Farha (1956-1993) à l’angle des rues Sainte-Catherine et Beaudry. Fruit de la collaboration de plusieurs personnes et organisations, cette fresque vient remémorer la lutte contre le VIH-sida menée par Ron Farha, fondateur de la Fondation Farha et du marchethon Ça Marche, qu’il n’aura jamais eu l’occasion de voir puisqu’il est décédé quelques mois avant la première édition.
Une murale originale avait été peinte coin des rues Sainte-Catherine et Wolfe il y a plus d’une vingtaine d’années par des jeunes du programme TAPAJ, comme l’a rappelé le conseiller municipal de Saint-Jacques, Robert Beaudry qui œuvrait pour cet organisme à l’époque. Mais la murale était en piteux état, s’écaillait et, de surcroit, avait fini par être invisibilisée par les installations de l’espace de la Galerie Blanc (remplacée cette année par la Place du Village).
Afin que se souvenir de la lutte contre le VIH-sida et les décès qu’il a causés dans les années 1980 et 1990 à Montréal ne tombe pas dans l’oubli, Michel Bélanger (ex-directeur des communications de la Fondation Farha), Gabriel Girard (sociologue et chercheur à l’INSERM de Marseille) et Denis-Daniel Boullé (chroniqueur et journaliste à Fugues) ont formé il y a trois ans un comité afin de faire revivre cette murale, maintenant relocalisée tout près du métro Beaudry et réinterprétée par l’artiste XRAY (Bryan Keith Lanier), avec la collaboration de l’organisme MU. Rappelons que durant un peu plus de 25 ans, la Fondation Farha a redistribué pres de dix millions de dollars aux organismes sida et aux maisons d’hébergement. Carolyn, Nancy et Linda Farha, les sœurs de Ron Farha, étaient présentes pour l’occasion, de même que d’autres membres de la famille, ainsi que l’ex-conjoint de Ron, Michael Kleiman.
Le contexte de cette inauguration était spécial, comme l’a rappelé Denis-Daniel Boullé dans son allocution : « Nous inaugurons la murale alors que la 24e Conférence internationale sur le sida vient de se terminer et que nous sommes en pleines célébrations de la Fierté. Cela ne pouvait pas mieux tomber. Ce rêve de Ron Farha, nous le partageons et croyons que le sida sera un jour définitivement vaincu».
« La murale originale symbolisait la lutte contre le VIH/sida et rendait hommage à tous ceux qui ont été emportés par la maladie, y compris Ron lui-même », rappelle sa sœur Carolyn. Elle cite Ron, qui disait : « ’’Le sida disparaîtra un jour, en attendant, nous avons l’opportunité d’apprendre et de grandir… Et nous devons le faire’’. Heureusement, aujourd’hui, les gens ne meurent pas du sida comme il y a 30 ans, bien qu’il y ait encore un grand chemin à faire », a souligné Carolyn Farha.
Robert Beaudry, parlant avec son cœur a insisité sur le fait que le VIH-sida sévit toujours, que « c’est une pandémie qui tue encore aujourd’hui et il y a des gens qui en souffrent encore, ces gens encore aujourd’hui sont stigmatisés». « Nous avons une grande responsabilité, en tant que grande métropole, de continuer à combattre cette maladie», rappelle Robert Beaudry. Rappelons qu’il y a bientôt cinq ans, le 1er décembre 2017, la mairesse de Montréal Valérie Plante signait la fameuse déclaration d’ONUSIDA pour faire de Montréal une ville sans sida d’ici 2030.
« Cette murale nous rend bien fier.e.s et pour bien des raisons. Je suis fière, mais je suis aussi émue aujourd’hui », a noté pour sa part Elizabeth-Ann Doyle, directrice générale de l’organisme MU devant la fresque. Elle a souligné, au même titre que d’autres intervenants, la ténacité de Gabriel Girard, Denis-Daniel Boullé et Michel Bélanger à « sauver » la murale de Ron Farha. Et s’est dite amplement satisfaite de la « réinterprétation et de la grande créativité démontrées par l’artiste XRAY […] » dans cette nouvelle œuvre.
« Je n’ai pas cherché à refaire la murale telle qu’elle était», a expliqué l’artiste XRAY. «J’ai voulu créer une connexion entre le temps dans lequel nous vivons et celui dans lequel se situait Ron Farha, un lien entre le passé et le présent. D’où le triangle rose qui était sur la fresque originale et qui symbolise le temps où vivait Ron, et l’arc-en-ciel qui représente notre époque. »
Retenu en France pour des raisons professionnelles, Gabriel Girard a tenu à envoyer un
message que Denis-Daniel Boullé a adressé à la foule : « Cette murale représente une « trace » mémorielle de la lutte contre le VIH à Montréal, un point de repère de cette formidable mobilisation communautaire face à la maladie. Ce travail de mémoire ne saurait se résumer à contempler un passé figé dans la nostalgie. Il est à l’inverse un levier d’action essentiel, à l’heure où de nouvelles épidémies mettent à l’épreuve nos solidarités et nos modes de vie ».