Jeudi, 3 octobre 2024
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    Houston-Osaka

    Benson et Mike vivent ensemble depuis quatre ans dans un petit appartement de Houston. Le premier est afro-américain, alors que le second est d’origine japonaise. Houston-Osaka débute alors que Mitsuko, la mère de Mike, s’installe dans leur logis pour l’été. Le lendemain même de son arrivée, Mike annonce cependant à son copain qu’il quitte quelques mois pour Osaka afin d’accompagner son père mourant. Une information capitale qu’il avait négligé de mentionner au préalable. On s’en doute, le roman de Bryan Washington se place sous l’égide des problèmes de communication.

    En ce sens, c’est donc paradoxalement dans les non-dits que l’on peut saisir toute la tension et la distance qui s’élèvent progressivement entre les deux hommes. Malgré une prémisse qui peut sembler dramatique, l’auteur fait également preuve d’un humour incisif. C’est par exemple le cas d’un échange de textos que Benson réécrit à plusieurs reprises, passant de « C fini entre nous » à « Je t’emmerde », puis à « C terminé connard », pour se conclure par un message laconique : « Cmt ça va », très révélateur d’une relation où l’essentiel est toujours passé sous silence. Lui-même afro-américain, Bryan Washington injecte également dans son roman une généreuse dose de critique sociale par l’intermédiaire de piques savoureuses.

    Ainsi, lorsque Benson décrit son quartier comme étant à la fois pauvre et racisé, il ajoute avec philosophie qu’un embourgeoisement important se met en place avec la venue des étudiant.e.s universitaires et que les résident.e.s noir.e.s optent pour la stratégie du laisser-faire puisque « comme la science l’a montré, les gosses blancs gardent les flics à distance ». Bien évidemment, la relation entre Benson et Mitsuko est tout sauf harmonieuse, bien que les colocataires forcés parviennent éventuellement à s’apprivoiser. De son côté, Mike tente de se réconcilier avec un père en fin de vie, alors que Benson évoque les souvenirs du sien, un météorologue alcoolique qui s’est surtout illustré par son absence. Le parcours des deux hommes semble destiné à évoluer en parallèle sans jamais se croiser, ce qui n’est pas sans faire écho au cheminement de leurs pères respectifs. La force du récit de Bryan Washington se révèle paradoxalement dans l’économie des vérités et des sentiments partagés par les différents personnages et qui, lorsqu’ils sont enfin exprimés, prennent une charge émotionnelle à laquelle il est impossible de résister.

    INFOS | Houston-Osaka / Bryan Washington. Paris : L JC Lattès, 2022, 396 p.

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