Samedi, 7 septembre 2024
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    Myst Milano, à la défense du ballroom et de la musique électro noire

    Myst Milano est (bien) connu.e du milieu du ballroom canadien. En fait, l’artiste né.e à Edmonton participe à des ballrooms à Toronto depuis de nombreuses années et a laissé sa marque en tant que DJ et rappeur.euse aguerri.e. Ses deux albums, Shapeshyfter (2021) et Beyond the Uncanny Valley (2023) se sont même retrouvés sur la longue liste du prestigieux Polaris. Si Myst Milano vient régulièrement à Montréal, iel en était à son premier passage à Osheaga cet été.

    Comment te sens-tu d’avoir joué à Osheaga ?
    Myst Milano : Oh, c’est si excitant ! J’ai grandi avec beaucoup d’amis qui venaient ici pour voir les artistes qu’ils aimaient. C’est donc génial de faire partie de la programmation. J’ai souvent joué à Montréal, d’abord sur la scène ballroom, puis dans le cadre de mes propres projets. Je serai ici toute la fin de semaine et je verrai Justice. Je serai in the building pour Justice. Oh, mon Dieu ! Le moi de 12 ans est en train de perdre la tête. Je n’arrive pas à croire que je vais voir Justice.

    Tu es omniprésent.e sur la scène ballroom. Sens-tu que le ball devient de plus en plus populaire ?
    Myst Milano : C’est en train d’arriver, c’est certain. J’ai l’impression qu’il y a eu un moment dans les années 90 quand Madonna a fait Vogue. Il y a eu ce moment de notoriété, mais ce n’est pas la même chose qu’aujourd’hui. Cette fois, les gens comprennent mieux le jargon, l’argot et le fonctionnement du ball, et ils comprennent mieux les scores… Le ballroom actuel est plus présent dans la conscience du public qu’il ne l’était à l’époque de Madonna. Grâce à Internet, nous avons la possibilité d’exercer un contrôle (gatekeep). Nous pouvons exercer une surveillance et dire : « Ceci est à nous, ce n’est pas à vous. Tu n’as pas le droit de nous dire comment faire, tu n’as pas le droit de te tromper. Si tu le fais mal, nous te dirons : “Tu le fais mal. Ne fais pas ça. Tu es gênant. Et on ne veut pas ça, girl.” » Nous avons la possibilité de contrôler la façon dont notre art est raconté. Pour nous, c’est comme un style de vie. Le ballroom, ce n’est pas seulement « Tu vas au ball, tu t’amuses. C’est le party. Puis tu rentres chez toi. » C’est un style de vie, on s’entraîne pour gagner dans ces compétitions.

    Sens-tu que le ballroom a encore du mal à percer ?
    Myst Milano : Je pense que c’est plus cool maintenant. Je pense que le fait d’être gai est de plus en plus accepté dans le monde, même si nous regardons les nouvelles et que cela ne semble pas être le cas. Je pense que la réalité est que les gens ordinaires regardent Drag Race. Vous savez, les Américains moyens regardent Drag Race. Le fait d’être gai n’est pas aussi jugé ou méprisé qu’il y a dix ans. Les gens connaissent le ballroom grâce à Beyonce et ils savent que le ballroom est plus qu’un simple concept. Il y a Pose, l’émission de télévision. Il y a aussi la série télévisée Legendary.

    Je pense que la plupart des gens trouvent cela intéressant. Je ne ressens pas vraiment de jugement. Tu défends fervemment la présence de la musique électronique noire (EDM) en Amérique du Nord.

    C’est important pour toi ?
    Myst Milano : Je ne suis pas la première personne à défendre cette cause. Je ne suis pas la première personne à le dire, mais la musique électronique noire a été un peu reléguée au second plan. Les gens ne savent pas que la techno vient de Détroit ni que la house vient de Chicago. Les gens ne savent pas que la musique de club a commencé à Baltimore, ils ne savent pas ce qu’est la Miami Bass ou comment elle sonne. Ils ne comprennent pas que la musique électronique est noire et américaine au sens le plus profond du terme. Je sais que l’Europe s’en est emparée, mais c’est ici qu’elle a commencé et c’est ici qu’elle appartient vraiment. C’est le point zéro de la musique électronique, un point c’est tout. Je pense que tout le monde devrait le savoir, de la même manière que les gens associent Berlin à la fête. Avec la techno, ils devraient faire la même chose avec Détroit.

    Tu utilises du visuel très raffiné et cru. Qu’est-ce qui t’inspire ?
    Myst Milano : J’aime beaucoup les films d’horreur et de science-fiction. Et donc cela s’intègre toujours dans ce que je fais. Il y a toujours un élément plus sombre dans tout ce que je fais, tout simplement parce que je trouve ce monde si intéressant. Je trouve les effets visuels très intéressants, et donc pour la pochette de mon dernier album, j’ai travaillé avec un studio d’effets visuels.

    D’où vient le titre de ton album, Beyond The Uncanny Valley (Au-delà de la vallée de l’étrange) ?
    Myst Milano : J’ai fait un album qui s’appelait Shapeshyfter avant ça, et Shapeshyfter était plus sombre. Je l’ai fait en 2020. Je traversais quelque chose en 2020 et j’ai donc fait cet album qui était du genre : « O.K. Laissez-moi sortir ça de mon système. » Puis j’ai dû le jouer pendant un an et je me suis dit : « J’en ai vraiment marre de parler de mon monde intérieur. Je veux parler de rien. » J’ai donc créé Beyond The Uncanny Valley pour parler de rien, pour me moquer de la musique stupide. Mais cela m’a semblé tellement faux en même temps. Parce qu’il y a tellement plus à dire que cette fun shit. J’étais donc aux prises avec cette idée, ce concept que j’avais. Je n’arrêtais pas de me poser des questions. Je me disais : « Est-ce que c’est vrai ? Est-ce que je suis réel ou est-ce que j’essaie juste d’ignorer ce que je vis ? » L’IA a commencé à se développer et les gens ont commencé à faire des photos avec l’IA et, en tant qu’artiste, je me suis dit : « Bon, est-ce que mon travail est le prochain ? » C’est comme si on prenait un morceau de l’âme de quelqu’un et qu’on le faisait passer par une machine. C’est complètement fou. Si cela arrivait à ma musique, qu’est-ce que je ressentirais ? Je me suis donc dit qu’il y avait un endroit au-delà de la vallée de l’étrange, où rien n’est réel, où rien n’a de sens, où rien n’est confortable, et peut-être que tout ce que je fais, tout cet art que je crée et cette histoire d’intelligence artificielle, c’est un peu là qu’elle existe.

    INFOS | https://www.mystmilano.com

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