Les hasards de la vie nous font parfois croiser des gens étonnants, passionnés, plus grands que nature. Une partie de la collection de l’un d’eux — Pierre Jean Chalençon —, dédiée à l’univers de Napoléon, est exposée dans la crypte de la basili-que Notre-Dame, jusqu’au 1er septembre prochain dans le cadre de l’exposition Les Trésors de Napoléon : un rendez-vous avec l’histoire.
En 2009, visitant le quartier du Marais à Paris avec un guide qui identifiait les différents styles architecturaux des édifices et expliquait l’histoire d’un des plus vieux arrondissements de la Ville lumière, connu maintenant comme le quartier gai de la métropole française, j’indique mon regret de n’avoir jamais eu la chance de visiter l’intérieur d’un appartement de grand style du quartier. Le guide passe un coup de fil et trente minutes plus tard nous nous retrouvons, rue Rivoli, à deux pas de l’Hôtel de Ville, dans l’immense appartement de Pierre Jean Chalençon, un excentrique personnage et bon ami du guide.
À voir la succession de tableaux de grande valeur, de mobilier Empire et de vieux documents étalés sur l’imposante table de la salle à dîner, il est évident que notre hôte est un grand amateur de l’époque napoléonienne. Du sol au plafond, l’appartement parisien de Chalençon est une sorte de temple de style Empire, rouge et or, avec des aigles, des feuilles d’or et partout des abeilles (l’un des emblèmes napoléoniens) sur des vitraux jusque dans les salles de bains. Dans un tiroir du salon se cachent des cure-dents qui viennent du service d’Austerlitz, dont une grande partie est conservée au Musée Carnavalet. Dans un autre, une bouteille de cognac de la garde de Napoléon à Fontainebleau.
Avec sa tignasse blonde frisée et derrière ses lunettes fumées, Pierre-Jean Chalençon ne passe pas inaperçu. Ouvertement gai, le personnage fascine et est totalement passionné par l’objet de sa collection — Napoléon et son époque — qu’on retrouve dans toutes les pièces de sa résidence. Chalençon sait comment intéresser, tant l’amateur que le néophyte, parsemant ses conversations par la description de différents objets, par des anecdotes historiques ou par la manière qu’il a fait l’acquisition d’un objet ou d’un autre. Une rencontre dont on ressort marqué, tant le personnage est haut en couleur.
Début 2014, je reçois dans mes courriels, un communiqué concernant la venue à Montréal pour l’été d’une importante collection sur Napoléon et constate qu’il s’agit de celle de Piere Jean. Je lui envoie un courriel et une rencontre est planifiée. On se revoit à son hôtel dans le Vieux-Montréal en mars et, autour d’un repas, on discute de sa collection et des expositions dont elle fait l’objet depuis quelques années déjà. En mode promo, il me montre à son doigt la bague en or sertie d’un saphir, que Napoléon portait lors de son sacre en 1804 (et qui sera présentée en première mondiale lors de l’exposition montréalaise) et, à son cou, le cachet de Jérôme, roi de Westphalie, le plus jeune frère de Bonaparte. Passionné et fasciné par l’Empereur des Français, Chalençon est issu d’un milieu qui ne le prédisposait pas à cette passion, «J’ai découvert Napoléon à l’âge de huit ans. Mes parents m’avaient offert une bande dessinée qui relatait la vie de Napoléon. Le livre m’a tellement intéressé que j’ai insisté auprès de mon père pour visiter Malmaison, le Musée de l’Armée et Fontaine-bleau.
Le contact avec les objets a fait le reste et explique en grande partie mon amour de la chose napoléonienne. Mais on peut dire que j’ai réellement débuté ma collection à l’âge de 15 ans. Depuis, Napoléon est devenu ma passion et mon métier», raconte-t-il. Autodidacte, il a acquis petit à petit, des œuvres majeures que personne voici 25 ans ne considérait comme intéressantes. «Quand j’achetais pour 300 euros une mèche de cheveux, un caleçon ou une manche de chemise, on me prenait pour un fou », se souvient-il. Les années lui ont pourtant donné raison. Visionnaire, il a su anticiper un engouement croissant pour l’Empire de la part du marché de l’Art international.
Bien qu’il soit encore assez jeune, Pierre Jean Chalençon possède déjà un ensemble d’objets très important, tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif. Des objets caractéristiques du?Premier Empire, époque prestigieuse où des budgets colossaux étaient attribués aux artistes au service du pouvoir politique. Aujourd’hui, Pierre Jean Chalençon est à la tête d’une collection de plus de 2 000 objets, qu’il fait voyager dans des expositions itiné-rantes à travers le monde. Après Melbourne, Winnipeg, plusieurs villes américaines et Bogota, c’est au tour de Montréal d’accueillir plus de 350 objets d’art ayant appartenu à Napoléon Bonaparte, dont certains présentés pour la première fois. Ces objets du célèbre monarque offriront au public un aperçu du monde de Napoléon.
L’exposition Les trésors de Napoléon comprendra des peintures, des sculptures, des dessins, des gravures, des objets d’art décoratif, du mobilier, de la porcelaine et des tapisseries. Ils seront inscrits dans quatre domaines qui ont illustré la vie de Napoléon : l’architecture, la sculpture, les arts décoratifs et la peinture. Les objets de l’empereur qui a régné sur la France de 1804 à 1815 proviennent essentiellement de la collection de Pierre Jean Chalençon, mais on retrouve également certains objets appartenants au sénateur Serge Joyal, exégète Québécois de l’Empereur.
INFOS | Les Trésors de Napoléon : un rendez-vous avec l’histoire, à la crypte de la basilique Notre-Dame (Espace B) 444, rue Saint-Sulpice, Vieux-Montréal H2Y 2V5, du mardi au dimanche de 10 h à 18 h (dernière entrée à 17 h) www.admission.com
1-855-790-1245.