Se désolant du manque encore trop important de modèles positifs pour les jeunes gais et lesbiennes dans notre culture, Dominique Fernandez convie le lecteur à une exploration des tenants et aboutissants de cette présence dans l’art. Une recherche qui demande parfois, selon les époques, un œil aguerri, mais qui se révèle tout de même riche.
Ce périple débute par une brève analyse de la redoutable influence de la psychiatrie, qui a pris le relais des Églises, dans le développement et le renforcement d’une homophobie omniprésente. L’auteur porte ensuite son regard sur les mythes fondateurs, en particulier sur les figures marquantes qu’ont constituées Ganymède, Hyacinthe, Narcisse, Médée, de même que certaines figures plus récentes. J’en prends à témoin le très étonnant opéra I Capuleti e i Montecchi de Vincenzo Bellini (1830) où le rôle de Roméo est écrit pour une femme qui professe ainsi son amour pour une autre femme, Juliette.
Une seconde section s’attarde à la face cachée de certaines œuvres (Billy Bud, Armance), artistes (Rembrandt, Verdi) ou personnages de fiction (Don Quichotte, Don Juan) pour en révéler les aspects méconnus. Une dernière section est consacrée à ce qu’il présente comme les phares de la cause gaie (Mishima, Wilde, Forster, Cocteau, Pasolini, etc).
Comme il le souligne, pendant les siècles récents, le mot amour ne référait, dans la conscience populaire, qu’au sentiment partagé entre un homme et une femme. Entre deux hommes ou deux femmes, il ne pouvait s’agir que de sexe. Ce sont ainsi trouvé occultés ou travestis les figures et modèles qui jalonnent pourtant notre histoire et qu’il nous convie enfin à redécouvrir.
Fernandez révèle ainsi non pas la part d’ombre qui se cache au sein d’œuvres fondamentales, mais bien plutôt, vous excuserez le jeu de mots un peu facile, la part de rose. Fascinant!.
Amants d’Apollon : L’homosexualité dans la culture / Dominique Fernandez. Paris : Grasset, 2015. 655p.