Le 6 août prochain, Ariane Moffatt va transformer l’Esplanade du Parc olympique en party tropical dans le cadre de la soirée FéminiX de Fierté Montréal. Ce sera l’occasion pour le public d’aller se déhancher, de s’époumoner et de célébrer une artiste qui fait vibrer le Québec depuis déjà 20 ans.
À quoi va ressembler ton spectacle à Fierté ?
Ariane Moffatt : Je vais présenter le Supergroupe de l’amitié, qui est en fait un fantasme pour moi. Après des mois de tournée solo de mon album Incarnat, j’ai eu envie de passer l’été avec un super band composé d’amis de qui j’ai été privée durant la pandémie. J’ai donc Alex McMahon, Jean-Phi Goncalves, Marie-Pierre Arthur et Joseph Marchand. On fait un show uniquement composé de tounes pop dansantes tirées de mon répertoire. Ça lève en masse. C’est parfait pour cet été.
Je veux profiter de la soirée pour célébrer la beauté de l’unicité de l’être humain. Quand j’ai commencé, il y a 20 ans, c’était difficile de mettre en mots le fait que j’étais lesbienne, mais que j’avais aussi été avec des gars, parce que les référents sociaux n’existaient pas.
Deux décennies plus tard, ça a complètement changé. Si j’avais été dans cette société à l’époque, j’aurais tellement pu identifier plus facilement mon identité pour qu’elle résonne socialement.
Il y a encore des personnes qui ne comprennent pas le besoin de se rassembler pour la Fierté. Et quand on regarde ce qui se passe aux États-Unis avec le droit à l’avortement, plusieurs personnes craignent que les prochains droits dans la mire des conservateurs soient ceux des minorités culturelles, sexuelles et de genres. Sens-tu que c’est d’autant plus un geste politique de se rassembler cette année ?
Ariane Moffatt : C’est sûr. Nos sociétés sont tellement polarisées. Plus on a des sensations d’avancées quelque part, plus il y a de la répression et des droits menacés à l’autre bout du spectre. C’est complètement absurde de penser qu’ici on célèbre enfin une éducation et [une] ouverture plus grande, ainsi que la possibilité d’être qui on est de différentes façons, alors qu’aux États-Unis, on n’a pas le droit de prononcer le mot « homosexualité » dans certaines écoles. Il ne faut jamais rien tenir pour acquis.
La Fierté pour moi, c’est une façon de se rappeler d’où on vient. Comme je l’avais fait aux Francos après le drame du Pulse à Orlando en 2016 : j’avais commencé le show en projetant des images d’archives des premières marches homosexuelles québécoises. Il faut se remémorer et saluer le travail des personnes qui ont défriché durant des moments où c’était pas mal moins hip de parler d’acceptation des différences et de fluidité des genres.
L’année 2022 marque le vingtième anniversaire de ton premier album Aquanaute. Pour l’occasion, tu as proposé à de jeunes artistes d’enregistrer des relectures de tes chansons. Le résultat est magique ! Ça m’a fait revivre plein de vieilles émotions, tout en redécouvrant les arrangements modernes de l’album Nouvelle génération. Comment as-tu vécu cela ?
Ariane Moffatt : Ça a été une expérience incroyable, j’ose dire humainement en premier. J’ai prêté mon studio à certain.e.s artistes, je suis allée manger avec d’autres, j’ai discuté de conciliation famille-carrière avec Robert Robert, qui vient de devenir papa. De vraies amitiés sont nées de ce projet. C’était important pour moi que ce ne soit pas tourné vers moi, mais que ma musique soit une page sur laquelle rebondir créativement. Quand leurs versions sont rentrées, j’ai eu un drôle de feeling, parce que ce sont mes tounes, mais je les découvrais avec la signature et l’esthétique d’artistes que j’aime. Il n’y avait pas de gêne à écouter ça fort dans mon char !
Comment trouves-tu l’équilibre entre ton désir de rester une musicienne actuelle et ton plaisir de transmettre aux plus jeunes ?
Ariane Moffatt : On reste actuel.le.s en faisant preuve de curiosité pour ce qui se fait derrière soi, en demeurant dans l’échange et en n’essayant pas de ne pas vieillir. Quand je me
rapproche de certain.e.s artistes plus jeunes, ce n’est pas pour me sentir dans la gang et pour dire : « moi aussi je suis jeune ». C’est pour transmettre et leur dire que c’est leur place.
En ce qui concerne l’idée de rester actuelle, c’est une question de passion et de curiosité musicales. Je ne mérite pas d’être là si je ne me remets pas un peu en question, si je ne prends pas de risques et si je n’explore pas des zones que je n’ai pas encore explorées. Il n’y a rien que je m’empêche de faire parce que je n’ai plus 25 ans… mais quand je suis allée chanter aux Francos avec Hubert Lenoir, j’avais le goût de faire du stage dive, mais ma blonde a dit : « Non, tu fais pas ça. Tu as 43 ans et c’est dangereux ! » (éclats de rire).
On a vu ton bonheur de transmission à Star Académie en 2021. Pourquoi ne pas être revenue en 2022 ?
Ariane Moffatt : L’album Incarnat était sorti quelques mois plus tôt. Les shows reprenaient. Et j’ai trois enfants. C’était juste impensable de faire tout ça. J’ai toujours dit que Star Académie et La Voix étaient des occasions pour changer ma routine, mais que je prioriserais toujours mon premier métier. Par ailleurs, je ne détestais pas l’idée de voir un nouveau prof de création. Je ne détiens pas les clés du savoir. Il y a autant de créateurs que de façons de créer.
Qu’est-ce qui t’attend au cours de la prochaine année ?
Ariane Moffatt : Je viens de m’acheter un studio, après 20 ans à me promener d’un espace à l’autre et à me faire tasser à plusieurs reprises comme de nombreux artistes l’ont déjà vécu. Je vais donc aménager mon nouvel espace au mois d’août, retomber dans un cycle de recherche et création, et réfléchir à la suite. Je veux encore faire de la tournée, mais peut-être pas de la même façon. La musique à l’image m’intéresse beaucoup et je suis ouverte à plein de projets.
INFOS | Ariane Moffatt sera du spectacle Féminix, qui se tiendra le samedi 6 août,
de 16h à 23h, sur l’Esplanade du Parc olympique. www.fiertemtl.com