Serge Fisette, qui signait la chronique Hommage à nos héros depuis 2021, est décédé le 30 décembre 2024, à l’âge de 80 ans. Celui qui fut d’abord et avant tout un potier et un céramiste est rapidement devenu l’un des grands défenseurs de la sculpture québécoise et de la mémoire de l’homosexualité masculine. Serge Fisette est mort des suites d’une longue maladie.
Ami et lecteur de Fugues depuis de très nombreuses années, M. Fisette a publié L’homosexualité masculine au Québec : de la Nouvelle-France à nos jours (chez Québec Amérique). C’est d’ailleurs depuis l’année de la publication de cet ouvrage, en 2021, qu’il a débuté sa collaboration avec Fugues, rédigeant à chaque édition des portraits de personnalités gaies québécoises : de Jean Basile à Robert Pelchat, en passant par Normand Moffat, Armand Monroe, John Banks, Denis Langlois, Robert Laliberté, Bernard Rousseau, Alain Bouchard, Thomas Waugh et plusieurs dizaines d’autres.
Membre et donateur des Archives gaies du Québec (AGQ), il a siégé sur le jury du prix Frank-Remiggi dans le cadre du 40e anniversaire de cet organisme. Il a également signé quelques recueils de poésie aux Heures bleues. Serge Fisette était une personne très généreuse malgré sa timidité. « C’était un fou d’écriture et d’édition, se rappelle le rédacteur en chef de Fugues, Yves Lafontaine. Depuis mon arrivée à Fugues en 1994, il nous écrivait souvent à la rédaction pour faire des suggestions et des commentaires posés et toujours constructifs. J’étais conscient que sa santé n’était pas des meilleures. Et lors de notre dernière discussion en octobre dernier, il m’avait annoncé qu’il était forcé de cesser sa collaboration à Fugues à cause de la dégénérescence progressive de sa vision. Il a tout de même pris le temps de nous faire parvenir plusieurs textes, dont les derniers paraîtront au cours des prochains mois. »
Serge Fisette, né en 1944, était détenteur d’un baccalauréat et d’une maîtrise en histoire de l’art. Directeur de la revue Espace sculpture de 1987 à 2013, il a également été commissaire d’expositions, en plus d’être l’auteur de plusieurs ouvrages sur la sculpture. Il a participé à des expositions à la Maison de la culture Rosemont-la-Petite-Patrie, à la Galerie Joyce Yahouda ou encore à la Maison de la culture du Plateau Mont-Royal, entre autres. Potier, puis céramiste, Serge Fisette ne se contentera pas de créer des œuvres, il désirait aussi promouvoir l’art de la sculpture au Québec. M. Fisette était « un personnage […] qui passait facilement de la pratique à la théorie », et souvent dans cet ordre pas habituel des choses, rappelle le critique d’art Gilles Daigneault, en entrevue au Devoir avec la journalise Catherine Lalonde. Ainsi, toujours selon M. Daigneault, Serge Fisette écrira sur la sculpture avant même de devenir historien de l’art. La Sculpture et le vent. Femmes sculpteures au Québec, Symposiums de sculpture au Québec : 1964-1997, Potiers québécois, Espaces utopiques : projections et prospections (avec François Chalifour), entre autres, sont autant d’ouvrages signés par Serge Fisette, qui a également cosigné l’ouvrage numérique Dictionnaire historique de la sculpture québécoise du XXe siècle.
Pour bien des artistes de la sculpture, il reste le souvenir de l’événement Artefact, pour lequel Serge Fisette a été le commissaire dans le cadre des éditions 2001, 2004 et 2007, alors que cette activité s’était tenue sur les bords du canal Lachine, sur le Mont-Royal ou encore au parc Jean-Drapeau (Expo 67). « Ç’a été le premier lieu à offrir une possibilité d’expérimentation de l’art public éphémère, contrairement à l’art public pérenne », d’expliquer au Devoir la consultante en art public Francyne Lord (qui a travaillé, jadis, sur des projets avec la SDC du Village).
« J’ai connu Serge Fisette alors qu’il était directeur de la revue Espace sculpture. J’étais à l’époque au Centre international d’art contemporain de Montréal et aux Cent jours d’art contemporain de Montréal, comme directeur des communications », se rappelle Pierre Pilotte, l’actuel coordonnateur des Archives gaies du Québec. « C’était surtout pour des artistes et de la publicité dans sa revue. C’était à partir des années 1985 et durant plusieurs années. Puis, on s’est perdu de vue pendant un certain temps. Et il m’a contacté pour relire son livre L’homosexualité masculine au Québec : de la Nouvelle-France à nos jours avant sa parution, mais malheureusement, je n’ai pas eu le temps. Ensuite, il nous avait approché, mon conjoint Claude Gosselin et moi, pour sa chronique dans le Fugues. Après la parution de son livre, on lui a demandé de faire partie du jury de la bourse Frank-Remiggi, en 2023. C’était un donateur depuis plusieurs années. Nous perdons ici un grand spécialiste de la sculpture contemporaine, également. » L’équipe de Fugues désire offrir toutes ses condoléances à la famille et aux proches de Serge Fisette.