Mardi, 20 mai 2025
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    L’émoi amoureux au féminin qui fait tout basculer

    Après avoir publié quatre livres destinés à la jeunesse, la Québécoise d’adoption Sarah Degonse s’intéresse aux premières années de la vie d’adulte, lorsque nos trajectoires de vie sont parfois bouleversées par des surprises professionnelles ou l’apparition d’une attirance imprévisible. Dans son roman, La où naissent les papillons, elle illustre comment l’amour peut changer de visage.

    Peux-tu nous résumer ton parcours ?
    Sarah Degonse : J’ai grandi à Aix-en-Provence dans le sud de la France. Je suis arrivée à Montréal il y a 15 ans, après mes études. Je suis tombée en amour avec le Québec et je ne suis jamais repartie. Je travaille en édition et je me suis spécialisée en littérature jeunesse, car j’aime profondément l’enfance, l’innocence, la candeur, les histoires de princesses, de fées et tout ce que la littérature peut offrir. C’est pour ça que mes premiers livres étaient destinés à la jeunesse. La trilogie fantastique Ania a d’abord été écrite pour donner le goût de la lecture à mon neveu. Puis, j’ai écrit l’album illustré, Les ballons d’eau, pour ma fille et pour tous les petits et grands enfants hypersensibles.

    Ton nouveau roman suit Suzanne, une Française de 21 ans installée à Montréal, pistonnée par sa mère pour devenir régisseuse adjointe dans un grand théâtre, en couple hétéro depuis quatre ans, passionnée de brocantes et de Jane Austen. En quoi cette étape de vie est-elle inspirante ?
    Sarah Degonse : C’est une période palpitante dans notre vie d’humain, mais également difficile, car on passe de l’enfance à la vie d’adulte rapidement. On nous demande de prendre de grandes responsabilités : on choisit une carrière, on quitte la maison familiale, on découvre nos premières amours, on essaie de se définir en fonction de notre entourage et de notre situation socio-économique. Suzanne est submergée. Elle débute une carrière à l’encontre de la volonté de ses parents. Elle vit en couple depuis des années. Elle est confrontée à des premiers émois qu’elle ne comprend pas.

    Elle est vive, sensible et drôle, mais infiniment dure envers elle-même. Pourquoi sa perception est-elle aussi biaisée ?
    Sarah Degonse : Parce que je suis comme ça. Mon personnage est hypersensible. C’est plus facile pour moi d’écrire sur ce que je connais. Il y a beaucoup de moi en elle. Le jugement le plus difficile qu’on a envers nous est le nôtre. Que ce soit sur notre physique ou nos capacités. Les femmes, particulièrement, se minimisent au travail. Ce n’est pas facile de se sentir à la hauteur. Suzanne doute de tout, car elle est au début de sa vie et elle ne se connaît pas. Au travail, elle rencontre Joséphine qui lui fait un effet inattendu et grandissant.

    Qu’est-ce qui t’a poussée à explorer la découverte d’une attirance pour une personne de même sexe ?
    Sarah Degonse : Je crois en l’amour, quel qu’il soit. En vieillissant, je me suis rendu compte que ce n’est pas important d’aimer un garçon ou une fille, mais d’aimer tout court. Je pense qu’on peut tomber amoureux d’un être humain. C’est ça, la définition de l’amour. Suzanne se demande pourquoi une fille la met dans tous ses états et elle vit une forme de panique, mais ce n’est pas présenté comme une chose négative. Elle se questionne sur son intérêt pour les filles, alors qu’elle n’a jamais ressenti ça auparavant. Je dirais qu’elle ressent une fascination qu’elle ne comprend pas. J’espère que mon livre va permettre d’effacer certaines frontières et certains interdits.

    En parallèle, Suzanne découvre une correspondance entre deux femmes de 1935 à Montréal. Qu’est-ce qui la happe dans les lettres pour lui donner l’impression de trouver des réponses sur sa place comme femme en société et sur ses sentiments troubles envers Joséphine ?
    Sarah Degonse : C’est l’effet miroir. Elle réalise que les interrogations des femmes, il y a 100 ans, sont les mêmes qu’aujourd’hui. Quand Suzanne découvre ensuite qu’elles étaient amoureuses, c’est comme un soulagement. Bien entendu, c’est voulu que ma narration et leurs lettres se répondent à différents endroits. Suzanne comprend ce qu’elle ressent pour Joséphine au moment où elle apprend que Prudence et Rose étaient amoureuses. Suzanne est aussi très interpellée de voir Prudence se questionner sur la place des femmes et mettre en action ses idées. Non seulement elle se révolte, mais elle fait des études et elle rejoint un groupe de femmes.

    Dans son milieu de travail, Suzanne compose avec les frasques d’un patron de style #metoo qui fait souffrir une jeune collègue. Que voulais-tu illustrer avec cette situation ?
    Sarah Degonse : Que les choses ne changent pas. Je voulais montrer qu’on considère encore les femmes comme des êtres faibles dans le milieu professionnel. Sa collègue tombe amoureuse d’un homme plus vieux, avec de la renommée et de l’influence. Malgré #metoo, elle y croit encore. Des femmes vont encore tomber dans le piège, en raison de leurs sentiments et des hommes qui vont en profiter. Dans le milieu du théâtre, le metteur en scène, qui a mauvais caractère, va défendre son employée et s’opposer à son propre supérieur. Je voulais casser les clichés. D’un côté, on a un gros bourru ami des femmes. De l’autre, un beau parleur qui est un gros connard.

    INFOS | La où naissent les papillons, de Sarah Degonse, Grund Quebec, février 2025, 264 pages.

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