Le Village est un quartier incontournable de Montréal. On ne cesse de donner son avis à son sujet, défavorable ou favorable, mais il bouge, il vit, et nombreux et nombreuses sont celles et ceux qui s’activent pour améliorer sa qualité de vie. Parmi ces personnes, il y a l’élu Robert Beaudry, qui en est à son second mandat. Le Village, il l’aime, et il tient à faire état de tous les chantiers en place, conscients des irritants, mais plein d’espoir pour les années à venir.
Comme il se plait à le rappeler, ce n’est qu’avec l’engagement de l’ensemble des actrices et des acteurs du secteur et, bien évidemment, la participation de la Ville de Montréal que le Village pourra se refaire une jeunesse. Pour celles et ceux qui s’en inquiètent, il n’y aura pas de travaux en 2025 ! Ce membre du comité exécutif annonce aussi ses couleurs et sera à nouveau engagé dans la campagne électorale municipale, en novembre prochain, alors qu’il sollicitera un 3e mandat.
Travaux sur la rue Sainte-Catherine
Robert Beaudry : Les travaux de canalisation ne commenceront pas avant 2026.
Enfin, si les travaux de canalisation sont reportés en 2026, c’est que nous voulons arriver avec un concept pour donner une signature au Village, comme l’a été la «canopée de boules de Cormier» qui a eu un rayonnement international. Il y aura une partie de la rue piétonnière à l’été 2026, avec des couloirs pour contourner les travaux, le succès d’une opération comme celle-ci tient tout d’abord en une bonne communication, avec les commerçant.e.s et les résident.e.s.
Avant nous n’avions que le canal de la SDC (Société de développement commercial) du Village, on a aujourd’hui le canal de l’Association citoyenne du Village de Montréal (ACVMtl), entre autres, pour passer des messages. L’autre élément majeur pour moi, ce sont les programmes de soutien qui seront au rendez-vous pour les commerces affectés par les chantiers, on les garantit avec le Service de développement économique, on veut aider les commerçants à passer à travers cette période-là, car on sait que c’est une période qui n’est jamais facile, qui a un impact. Mais cela peut avoir un impact positif après.
Communication, programmes d’aide mais aussi programmation avec la SDC de l’activation et de l’animation des espaces qui ne seront pas affectés par les travaux pour que les gens viennent dans le secteur, donc d’assurer la promotion des commerces qui sont ouverts malgré les travaux. Pour le Village, c’est un chantier majeur sur la colonne vertébrale qu’est la rue Sainte-Catherine. C’est pour cela qu’on avait lancé le Forum du Village (en septembre 2022), pour discuter de tout cela. Il y a plein de choses qu’on a fait. On a participé à la création de l’ACVMtl, on a mis en place aussi le FIL, le Fonds d’investissement local, c’est 500 000$ sur trois ans, de l’aide à des projets pour des organismes communautaires du secteur du Village. Comme conseiller local, je veux tabler sur cette collaboration avec la SDC du Village et avec l’ACVMtl et d’autres encore.
Nous soutenons la SDC du Village aussi par l’animation l’été et la piétonnisation, mais aussi avec la brigade des Allié.e.s du Village, on vient pérenniser ce projet-là à l’année. Si on peut transformer un environnement, ce sont tous les membres de l’environnement qui doivent y contribuer, dont les populations vulnérables, qu’on leur donne une opportunité de se faire valoir et de se mettre en action pour prendre soin de cet environnement-là.
Les irritants qui perdurent, l’itinérance, la toxicomanie et la sécurité…
Robert Beaudry : Je fais une distinction comme les citoyens et les citoyennes du quartier qui font une distinction entre itinérance et criminalité. Par exemple pour moi, ce qui se passe autour du métro Beaudry n’est pas un enjeu d’itinérance mais un enjeu de criminalité.
Commençons alors par la criminalité…
Robert Beaudry : On vient de mutualiser les efforts des 2 PDQ, 21 et 22, pour avoir une présence policière sur le terrain mais aussi pour rapprocher les équipes d’enquêtes sur le terrain parce que dans les objectifs du poste 22, c’est de ramener des équipes d’enquêtes qui enquêtent sur les réseaux criminels avec une augmentation d’effectifs dans le secteur (30 à 35 policièr.e.s pour l’été, et de 40 à 48 à partir de l’automne, ndlr). Pour les citoyens et les citoyennes, il n’y aura aucune différence. Le poste 22 reste un point de services, il y aura toujours des patrouilleurs en périphérie, le schéma de couverture reste le même, les points de service restent les mêmes mais on utilise les bureaux de façon différente, c’est l’opportunité de ramener les équipes d’enquêtes au plus près du terrain. La Ville donne les moyens mais effectivement on demande plus de moyens des autres ordres de gouvernement entre autres pour les équipes mixtes plus particulièrement, ce qui est selon moi la clef du succès (les équipes mixtes).
Et concernant le Parc Charles-S.-Campbell où l’on retrouve des seringues et souvent de la vente de drogues, c’est pourquoi les familles n’y vont plus !
Robert Beaudry : Le point de service du poste 22 reste ouvert, il y aura toujours des patrouilleurs en périphérie, le schéma reste le même. C’est une mutualisation opérationnelle, mais les points de services des PDQ 21 et 22 restent. Donc, il y aura une plus grande présence policière au parc Charles-S.-Campbell, on n’est pas fermé à l’idée de faire affaire avec des partenaires comme le projet pilote avec des agents de sécurité si l’on pense au volet criminalité qui s’y déroule. On peut aussi occuper le parc si, par exemple, un groupe veut organiser une activité, on a un Fonds d’initiative local (FIL), on met des sommes d’argent disponibles pour l’organisation d’événements. Aujourd’hui, on a une association citoyenne, on a un FIL, tout est là pour qu’un porteur de projet décide de faire une activité comme l’ancienne Fête de quartier, qui était avec Peter Sergakis, et on apportera notre soutien technique. Maintenant, concernant le parc lui-même, il y a un réaménagement qui s’en vient avec la rue Garaud, qui est à l’arrière du parc.
Concernant l’itinérance, les problèmes de santé mentale et de toxicomanie sont souvent liés, comment y répondre ?
Robert Beaudry : S’il faut être sans concession en ce qui concerne la criminalité, il faut une approche bienveillante face aux populations vulnérables. Il faut rappeler que pour certain.e.s itinérant.e.s, c’est avant tout un manque de logements abordables, elles sont victimes de la loi du marché et de l’augmentation des prix du loyer. La Ville veut répondre aux besoins de son monde, mais ce n’est pas de notre compétence. On marche parfois sur les compétences des autres paliers de gouvernement et on l’a fait cet hiver en ouvrant des haltes chaleurs. Quand une ville est rendue à ouvrir des haltes chaleur, c’est qu’il y a un moment donné quelque chose qui ne marche pas. Je vais aller à la défense de mon collègue Lionel Carmant (le ministre des Services sociaux) c’est quelqu’un qui est proche du terrain, qui veut, comme individu, comme ministre…
Excusez-nous, mais ce n’est pas l’impression qu’il ne donne…
Robert Beaudry : Je sais, mais c’est le seul ministre que j’ai vu débarquer pour rencontrer les organismes communautaires du secteur, mais le problème, c’est qu’ensuite les budgets ne suivent pas. Quand on ne soutient pas les organismes communautaires à la hauteur des besoins, il faut continuer à faire des pressions auprès du gouvernement. Nous discutons régulièrement avec Lionel Carmant des réalités et des enjeux du Village et du Quartier Latin qui sont les mêmes. De notre côté, nous on a mis les sommes pour le soutien communautaire, particulièrement dans le dossier de l’itinérance. On arrive avec des projets d’unités modulaires. Mais pour sauver le Village cela ne viendra pas que du Village, mais de mesures qu’on va développer dans d’autres quartiers, c’est-à-dire, en offrant plus de services aux populations vulnérables dans d’autres quartiers, j’enlève la pression à un secteur.
Cela ne veut pas dire qu’il y a trop d’organismes dans le Village, ils sont importants et il faut continuer à les consolider.
En revanche, il n’y en a pas assez ailleurs. C’est pour cela que l’on a acheté l’église Sainte-Bibiane dans Rosemont que l’on travaille dans Ahuntsic à un projet modulaire comme dans NDG et Côte-des-Neiges pour les personnes vulnérables. Il y a des éléments qui vont venir du Village et d’autres qui vont venir en périphérie et répondre aux besoins de cette population. La ville joue un rôle par l’acquisition d’anciennes maisons de chambres, on en a acheté près du métro Papineau, et l’objectif est de les offrir à des groupes communautaires pour les rénover et les gérer. C’est une solution. Le travail sur l’abordabilité, sur le logement social, le logement hors-marché, contribue à réduire la tension dans l’espace publique parce que les gens ont un endroit pour se réfugier et trouvent aussi un accompagnement nécessaire.
Et plus spécifiquement, en toxicomanie et en santé mentale ?
Robert Beaudry : Je travaille très fort auprès de mon collègue Lionel Carmant pour le
sensibiliser à cet enjeu-là. Il y a un trou de services dans le réseau des services sociaux et de santé concernant la toxicomanie. C’est problématique. Parce que si l’on envoie une personne toxicomane vers le CHUM, ils ne sauront pas quoi faire avec et ils vont la remettre dehors. Les sites offrant des services ne sont pas assez nombreux sur le territoire montréalais. Il y a un manque dans les services de santé pour soutenir la population toxicomane.
Nous, on va continuer à travailler avec les groupes communautaires qui font de la prévention, car on veut éviter les surdoses. En termes de surdoses, on est dans des chiffres semblables au pic du sida dans les années 1980, on peut diriger cette population vers des ressources, mais si le réseau de la santé ne s’adapte pas, cela devient difficile. On doit porter le message avec nos collègues avec nos représentants politiques d’autres paliers de gouvernement où ça prend un réseau plus soutenant pour ces personnes-là, pour éviter par exemple, qu’elles consomment dans l’espace public. On ne veut pas que nos enfants se retrouvent devant des seringues ou assistent à certaines situations.
Est-ce que les soustiens sont en quantité suffisante, est-ce qu’ils sont bien répartis sur le territoire de Montréal ? Sûrement pas. Mais cela ne relève pas de la compétence de la Ville. On le rappelle tout le temps au provincial et au fédéral. On porte ce message lors des conseils municipaux où l’on rappelle les limites des pouvoirs de la Ville. Valérie Plante parle aujourd’hui de crise humanitaire.
Et le projet de l’Espace LGBT ?
Robert Beaudry : On veut soutenir le projet Espace LGBT ou encore celui du Centre Saint-Pierre pour offrir des locaux à des prix abordables aux groupes communautaires. On sait que les organismes communautaires LGBTQ sont les moins bien financés par l’État, on le rappelle lors de nos différentes rencontres pour le maintien de ces organismes dans leur milieu. Nous faisons des efforts, on aide quand on peut, et surtout on porte le message. C’est pour cela que l’Espace LGBT vient cristalliser pour moi quelque chose d’important.
On les a aidés pour le financement de l’acquisition et la prochaine étape est la rénovation de la bâtisse, et cela demande beaucoup d’amour.
Le gros soutien va venir du fédéral car c’est là où il y a le plus d’argent en termes d’infrastructures. On espère qu’ils auront des bonnes nouvelles du gouvernement fédéral, on va continuer à les accompagner, on a adapté la réglementation pour faciliter l’installation communautaire pour les chantiers pour ne pas payer certains permis, ils pourront bénéficier de ces assouplissements-là. Il y a vraiment un soutien pour le réseau communautaire.
Je porte aussi le message auprès de Martine Biron, pour lui présenter notre plan sur l’avenir du Village puisqu’elle est la ministre responsable des communauté LGBTQ+ au gouvernement et pour la sensibiliser à l’importance de soutenir financièrement l’Espace LGBTQ.
Le visage du Village va changer à ses deux extrémités avec les nombreux projets immobiliers, la réfection de la membrane de la station Berri et les alentours de la place Émilie-Gamelin (avec l’Îlot Voyageur et les prochaines tours de Mondev).
Robert Beaudry : Actuellement il y a de bonnes nouvelles, il y a des commerces qui viennent s’établir tout en sachant que des travaux sont à venir. Il y a aussi la Tour Émilie-Gamelin à la place de l’ancien DaGiovanni dont les travaux viennent de commencer. Les permis sont émis depuis longtemps et ensuite les délais dépendent des promoteurs. Pour l’ancien Îlot Voyageur, le projet a pris du retard en raison de la pandémie. On a fait une entente préliminaire avec Mondev et UTILE (Unité de travail pour l’implantation de logement étudiant). Empire s’installe aussi dans les locaux de l’ancien Archambault. Quant à l’est de la rue Sainte-Catherine, proche de Papineau, il y a la construction Mondev avec une épicerie Maxi. On parle aussi d’un projet résidentiel à la place de l’ancien bar Berlin, ou encore du redéveloppement de TVA qui comprend aussi la transformation du stationnement en tour d’habitation, et ça, c’est déjà passé au comité exécutif.
On arrive à la fin de ce mandat-ci et je pense que c’est important que l’on puisse parler de tout ce que l’on a fait. Tout n’est pas parfait, mais il y a énormément de choses qui ont bougé. Je pense que l’on se retrouve dans une position beaucoup plus solide comme communauté dans le secteur que lors du début du mandat.
Ma volonté, comme conseiller de St-Jacques, était de dire que les réponses ne viendraient pas toutes de la Ville, car si elles viennent juste de la Ville, quand on parle de social, d’itinérance, de vitalité commerciale, la Ville de Montréal peut faire des choses mais toute seule elle n’y arrivera pas, c’est avec l’addition de chacune des personnes que l’on va pouvoir faire cette transformation. Et nous travaillons ensemble, comme avec la SDC et l’ACVMtl, et nous avons mis en place les assises, les fondations. Mon objectif dans un troisième mandat c’est de capitaliser là-dessus et accélérer les choses. C’est ce que je souhaite.
– Article écrit par André-Constantin Passiour et Denis-Daniel Boullé