Samedi, 2 novembre 2024
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    Ce qu’était la rue Ste-Catherine Est aux 19e et 20e siècles avant le Village

    Depuis ses tout débuts, vers 1875, la rue Sainte-Catherine Est présente une vocation commerciale. Des commerces, des banques, des théâtres et, plus tard, des cinémas se greffent à cette artère commerciale. «La Sainte-Catherine est une rue en éternel changement et cela le restera toujours», de souligner Michel Jutras qui est guide touristique. Elle connaît ainsi un développement en dents de scie avec des périodes fastes et d’autres de décroissance marquée. Elle bénéficie de l’industrialisation: des industries s’y installent, de riches entrepreneurs y ouvrent leurs commerces et résident dans le quartier, ils se font construire des édifices avec des colonnes, des frises, des corniches, etc. Mais l’artère voit son achalandage diminuer dans les années 1960-1970 et ce jusqu’à ce que la «communauté gaie» s’y installe au début des années 1980.

    Évidemment, on ne peut pas, en quelques lignes, brosser le tableau de cette artère commerciale qui a vu des centaines de commerces ouvrir et fermer leurs portes au fil des décennies. On va donc s’attarder sur quelques édifices qui sont encore reconnaissables aujourd’hui dans le secteur. Pour ce qui est de la période des cabarets, il faudrait tout un article pour retracer l’histoire culturelle de ce quartier qu’est le Village de nos jours. 

    C’est donc après l’incendie majeur de 1853 dans le Vieux-Montréal, que la bourgeoisie canadienne-française quitte ce secteur pour monter la côte et s’installer là où est le Quartier latin aujourd’hui. À partir de là, la rue Sainte-Catherine Est va se développer «parce que cette bourgeoisie a besoin de commerces, mais elle ne veut pas de bruit et de va-et-vient dans son coin tranquille», dit Michel Jutras.

    Le tramway électrique fera son apparition sur Sainte-Catherine dès 1899 et cela durera jus-qu’en 1959, ce qui facilitera grandement les déplacements.  

    En parallèle, d’autres gens d’affaires, comme les Molson, sortent eux aussi du Vieux- Montréal ce qui coïncide avec l’industrialisation et l’arrivée d’entreprises le long des berges du Saint-Laurent. Des travailleurs viennent résider dans le quartier. Dès 1868, Nazaire Dupuis ouvrira un premier magasin au coin de Montcalm. En 1882, le fameux magasin Dupuis Frères emménage définitivement dans des locaux entre Saint-Christophe et Saint-André. Là où est la Place Dupuis maintenant. C’est en 1978 que Dupuis Frères fermera ses portes et laissera place à des bureaux, des commerces et un hôtel. La Maison Vallières, ce qui est aujourd’hui le Unity, remplacera la Maison Labonté, au coin de Montcalm. Ces deux commerces canadiens-français se succèdent ainsi et «le M. Vallières en question fondera même l’Association des commerçants des nouveautés, qui regroupera des marchands canadiens-français du secteur dans les années 1920», indique Michel Jutras. Comme on le voit, l’idée de créer un regroupement de marchands du quartier n’est pas si nouvelle que ça ! 

    Un autre magasin à rayons, Letendre & Fils (1880) s’établira un temps près de la rue Wolfe et s’appellera Au Bon Marché (portant ainsi un nom de commerces existant tant à Paris que New York) pour lui donner plus de prestige. Mais il terminera  ses activités en 1927. 

    Si on pousse plus vers l’est, autre édifice existant de nos jours, celui de la Banque d’Hochelaga (1894), où logent Priape, l’Aigle Noir, etc. avec ses corniches et son allure un peu de «château». «Des architectes prestigieux érigeront des édifices magnifiques dans ce qui est le Village aujourd’hui», poursuit Michel Jutras. À l’époque la banque louait des espaces commerciaux au rez-de-chaussée alors que les bureaux occupaient les autres étages. Pour la petite histoire, la Banque d’Hochelaga est l’ancêtre de la Banque Nationale… 

    Plus loin, la bâtisse des anciens savons J. Barsalou & Cie se démarque encore malgré le fait qu’elle a été érigée en 1888. C’est là où sont situés le District Video Lounge, Évolution ou encore la Galerie DBC. On y remarquera les riches ornements et des colonnes. «Il y avait une marquise et on pouvait marcher en dessous, continue M. Jutras. Il y avait des commerces au niveau de la rue et la fabrique de savon était aux étages supérieurs.» La production de savon déménagera dans un autre édifice, sur De Lorimier en face de ce qui est le siège social de la CSN.  

    Le building Amherst (datant de 1925) «est un des tous premiers édifices à Montréal où il y a eu un stationnement souterrain pour ceux qui étaient assez fortunés pour avoir des autos à l’époque. Il y avait des commerces au rez-de-chaussée et des ateliers de couture de fourrure aux étages supérieurs», explique Michel Jutras. Ce fut, également, un des tous premiers édifices multifonctionnel avec une salle de bowling au sous-sol et une salle de cinéma (1926) qui est devenu l’Olympia de Montréal.  On ne peut passer sous silence l’édifice de la Pharmacie de Montréal (1934), fondée par le grand-père du pharmacien Martin Duquette, qui fut construit dans un style non pas classique mais Art Déco en vogue à ce moment-là. Il y a aujourd’hui une école de coiffure et un restaurant libanais, entre autres.   

    Côté culturel, le Théâtre National Français (le Théâtre National) s’installera dès 1900 à l’angle de Beaudry. C’était le premier théâtre professionnel francophone. Il sera dirigé, de 1936 à 1953, par Rose Ouellette appelée «La Poune» ! C’était aussi la première fois qu’une femme administrait un théâtre. Le premier cinéma permanent au Canada est ouvert par Léo-Ernest Ouimet, en 1906, et sera fermé en 1924. Un autre cinéma occupe l’espace au coin de Montcalm dès 1967 et reprendra le nom Le Ouimetoscope en l’honneur de Ouimet. Ce cinéma aussi sera abandonné en 1993. Aujourd’hui, des condos et une chaîne de restauration rapide ont remplacé les salles de cinémas. Le cinéma semble être populaire dans le secteur puisque on inaugurera Le Champlain, en 1948, à l’angle de Papineau. Il cessera ses activités en 1987. La bâtisse sera démolie sous peu pour laisser place à un projet domiciliaire de 203 logements (et commerces au rez-de-chaussée). Cela faisait 15 ans que l’édifice avait été déserté. 

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