Il a 84 ans, est anglais et fait des films. Il a 28 ans, est Français et écrit des livres. Le premier, Ken Loach, a connu tous les honneurs des festivals de cinéma. Le second, Édouard Louis, a fait sensation dans le petit monde littéraire avec des romans autobiographiques.
Outre le fait qu’ils viennent de la même classe sociale, ils ont tous les deux à cœur de donner la voix à celles et ceux qui sont les plus ignoré.es, les plus déprécié.es et les plus invisibilisé.es. dans nos sociétés. Les «petites gens» comme on pourrait dire s’il n’y avait une connotation méprisante dans l’expression.
Édouard Louis s’est fait connaître avec Pour en finir avec Eddy Bellegueule, son vrai nom, où à travers son histoire de jeune homosexuel dans une région ouvrière de France, il démontait tous les rouages de l’oppression qui circulaient à tous les niveaux, aussi bien entre patrons et employé.es, hommes et femmes, parents et enfants. S’inscrivant dans la tradition de Foucault et de Bourdieu, il axe toute sa démarche dans la représentation de misère sociale et culturelle et des structures qui contribuent à la reproduire.
Ken Loach, ce sont des fresques sociales qu’il porte à l’écran, lui aussi, décortiquant les différents fardeaux qui pèsent sur les moins fortunés de la société. Des fardeaux qui, sauf exception, se transmettent de génération en génération. Mais est-ce que leur travail en tant qu’artistes peut être un vecteur de changement? Voilà une des réflexions que l’on retrouve dans Dialogue sur l’art et la politique, où les deux confrontent leur réflexion et leur expérience à partir de leur œuvre singulière avec le même désir d’être un reflet le plus sincère des réalités sociales.
Se dégage alors une vision de l’art qui n’est pas nouvelle, mais qui continue de traverser les époques, un art contre l’art lui-même, de confrontation, de transgression, de révolte pour faire émerger le plus souvent une réalité que l’on ne voit plus ou que l’on ne veut pas voir parce que trop dérangeante.
Accessible à tous, cette petite plaquette redonne l’espoir et nous enjoint à ne pas se résigner, bien au contraire, mais à s’engager quel que soit le domaine, fusse-t-il celui de la création.
INFOS | Dialogue sur l’art et la politique Ken Loach, Édouard Louis Des mots, PUF, 2021