Oui, les Archives gaies du Québec (AGQ) peuvent maintenant mieux respirer et envisager l’avenir avec un peu plus d’enthousiasme alors que la pandémie de coronavirus frappe toujours la société. Il faut dire que l’appât était intéressant : une toile de la célèbre artiste Françoise Sullivan, une alliée de la communauté, était offerte en tirage à l’occasion de la campagne de financement. Plusieurs projets pourront ainsi aller de l’avant pour les AGQ, ainsi que des collaborations à des événements.
« La campagne de financement lancée l’automne dernier a porté ses fruits malgré la fermeture de tout un pan de l’économie », explique Pierre Pilotte, le coordonnateur des Archives. « Nous sommes très, très contents d’atteindre le chiffre de 40 000 $. On a fracassé un record. Normalement, on récolte de 23 000 $ à 24 000 $. Et on a amassé cet argent avec une centaine de donateurs et donatrices seulement. Mais ce sont des gens très généreux qui appuient les Archives régulièrement. »
L’artiste Françoise Sullivan, une des rares survivantes ayant signé le manifeste du Refus global, publié en 1948, avait ainsi généreusement offert aux Archives sa création « Murmure » (eau-forte sur papier, 34 cm x 33 cm, 2018), une épreuve d’artiste dont le tirage est limité à 20 exemplaires. L’œuvre, d’une valeur de 1750 $, est encadrée avec une moulure de bois laquée blanche. Et c’est l’ancien ministre du Tourisme au fédéral et ex-président de Tourisme Montréal, Charles Lapointe, qui a été l’heureux gagnant du tirage ! « Charles [Lapointe] est un donateur des Archives de très, très longue date. Nous l’avons rejoint en Floride pour lui annoncer la bonne nouvelle. Il n’en revenait pas d’avoir remporté la toile ! Nous remercions Françoise Sullivan pour sa contribution aux Archives », exprime Pierre Pilotte.
En recherche de subventions
« Ce n’est pas parce que nous avons eu une campagne de financement réussie qu’on n’a pas besoin de plus d’argent », poursuit le coordonnateur des AGQ. Il y a toujours la question de la permanence du bureau et d’un budget de fonctionnement adéquat que nous n’avons pas, et ce, depuis des années maintenant. » C’est pourquoi que les gens des Archives vont cogner aux portes du Bureau de lutte contre l’homophobie et la transphobie (ministère de la Justice du Québec) et du gouvernement fédéral, entre autres auprès du ministre de l’Environnement et du Changement climatique Steven Guilbeault, qui est aussi le député de Laurier-Sainte-Marie, le comté où sont situées les Archives.
« Cette année, nous ne voulons négliger aucune possibilité. Nous recevons de plus en plus de demandes de stages et de recherche d’étudiants des universités Concordia, UQAM ou encore McGill. Nous en sommes très contents, mais on n’a pas de budget pour engager du monde pour faire de la permanence. Nous avons des demandes de bénévolat aussi, mais encore là, il faut qu’il y ait des gens pour recevoir les bénévoles, il faut que ça change, on ne peut plus continuer comme ça », affirme Pierre Pilotte.
Plusieurs projets
L’an dernier, dans le cadre d’un échange avec les Archives LGBTQ+ de Paris, deux artistes françaises avaient passé quelques semaines à Montréal dans le but de faire de la recherche aux AGQ et de tenir une éventuelle exposition. « Il s’agit ici d’une entente avec le ministère des Relations internationales et de la Francophonie (Québec) et, normalement, des artistes d’ici auraient dû se rendre à Paris ce printemps, mais cela est reporté tant qu’on n’aura pas une situation sanitaire plus claire. Mais si les choses changent pour le mieux, on verra à ce moment-là », indique Pierre Pilotte.
Comme on vous l’apprenait au mois de décembre dernier, la 24e Conférence internationale sur le sida se déroulera à Montréal l’été prochain. Les Archives proposeront un projet pour y participer, « peut-être avec une exposition d’affiches ou d’autres items provenant du défunt CSAM [Comité Sida Aide Montréal] et du Fonds Douglas Buckley-Couvrette [un activiste décédé en 2002] », ajoute Pierre Pilotte. L’été dernier, en collaboration avec les Archives, Fierté Montréal avait présenté l’exposition 50 lieux historiques LGBTQ+ de Montréal, en installant des affichettes et des oriflammes pour marquer des endroits où il y avait, par exemple, des bars, des restaurants ou des événements associés à la communauté LGBTQ+. « Je crois que cette exposition a connu beaucoup de succès », poursuit Pierre Pilotte. « Nous ne savons pas si elle reviendra cette année puisqu’elle dépend de Fierté Montréal. Par contre, nous allons présenter un nouveau projet de participation à ces festivités et qui ira dans le même sens. »
Enfin, les AGQ accueilleront cette année un étudiant au doctorat de l’Université de Durham, en Grande-Bretagne, qui viendra passer de huit à dix semaines aux Archives grâce à une bourse de son établissement, afin de mener des recherches sur la relation mère/fils queer.s au Québec, entre autres, dans le cinéma et les divers documents audiovisuels. « Ma recherche doctorale porte sur les représentations filmiques de la maternité queer au Québec des années 1960 à nos jours. J’entends non seulement “queer” dans le sens du genre et/ou de l’orientation sexuelle de la mère québécoise et de ses enfants, mais aussi [de] la notion d’être arraché aux systèmes de contrôle hétérosexistes et patriarcaux — souvent issus de la colonisation multiple de la province — qui se sont longtemps appuyés sur les mères comme outil de construction d’une nation conservatrice plutôt que progressiste », écrit Billy Errington, dans sa proposition aux Archives.
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