Jeudi, 3 octobre 2024
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    Randy Boissonnault, les enjeux LGBTQ+ toujours à l’ordre du jour en politique ?

    Randy Boissonnault est l’un des huit* députés ouvertement LGBTQ+ de la Chambre des communes. Le député d’Edmonton-Centre a d’abord été élu en 2015, puis réélu en 2021 après une défaite en 2019. Lui qui a déjà été conseiller spécial relativement aux questions LGBTQ2E auprès du premier ministre, Randy Boissonnault occupe aujourd’hui les postes de ministre du Tourisme et de ministre associé des Finances. Fan « de longue date » de Fugues et admettant même que la revue l’a aidé dans son propre coming out, le Franco-Albertain a accepté de répondre à nos questions.

    Quelques mots sur l’interdiction récente des thérapies de conversion. Il semble y avoir eu quelques tiraillements au Parlement…
    Randy Boissonnault : J’ai été très content et touché par le fait que l’interdiction de la thérapie de conversion soit adoptée à l’unanimité. C’était un beau moment dans ce mandat. Parce que c’était la troisième fois que cette mesure était présentée à la Chambre des communes : on a essayé en 2019, puis il y a eu une autre tentative quand je ne faisais pas partie du gouvernement. Et là, pour cette troisième fois, on les a mis en notice qu’on était très sérieux, et qu’on voulait que ça passe.

    Pensez-vous donc qu’on est rendu à un point où la « question » LGBTQ+ n’est plus un enjeu aussi controversé qu’avant ?
    Randy Boissonnault : Regarde : moi, je vais évaluer ça dans les prochaines élections, dans les plateformes des partis, mais aussi dans l’appui que la chambre va nous donner sur d’autres mesures, comme sur le plan d’action LGBTQ2, d’autres enjeux… Donc disons que je surveille les choses de très près, avec la ministre Ien [ministre des Femmes, de l’Égalité des genres et de la Jeunesse, NDLR], avec le ministre Hussen [ministre du Logement, de la Diversité et de l’Inclusion, NDLR], avec mes autres collègues LGBTQ2, à la Chambre et de mon côté des Libéraux, pour voir si on est arrivés au point que les questions LGBTQ2 ne sont plus un football politique. Je suis dubitatif. Après tout, on peut toujours améliorer notre approche dans nos politiques, et ce, autant de notre côté au gouvernement, mais aussi à travers le pays. On a, dans ma ville, 65 % des jeunes sans-abris qui sont LGBTQ2 parce que leurs parents straight les tassent du foyer. On a des ainés qui, quand ils veulent aller dans un foyer pour ainés, sont menacés parce qu’ils sont LGBTQ2. On ne peut pas être là. Donc, l’important ce ne sont pas seulement les réflexes qu’on a au Parlement. C’est aussi l’espace qu’on peut créer pour les gens LGBTQ2 à travers le pays au quotidien.

    Même si vous n’êtes plus affecté aux questions LGBTQ+, pouvez-vous donner des précisions sur les prochains projets du gouvernement en ce qui concerne ces enjeux ?
    Randy Boissonnault : Je suis le dossier de très près. Il faut dire que je vois passer les dossiers au cabinet et dans les comités de cabinet. Le plan d’action LGBTQ2 a été élaboré, et ce, pendant une pandémie globale. Malgré tous les défis qu’on a eus, les consultations ont été faites, le plan a été élaboré, là c’est la question de le financer. Ça, c’est un projet en cours. Aussi, il faut qu’on ait une décision finale en ce qui concerne les dons de sang. Et, là encore, je suis le dossier de très près, parce que c’est moi qui ai donné le financement — au nom de la ministre à l’époque — à la communauté scientifique pour faire des recherches et vérifications.

    Aussi, il y a la question de financer les organismes. Le 2 février, la ministre Ien a annoncé la prolongation du financement — soit une enveloppe de 7,5 M$ — pour le renforcement des capacités et des projets communautaires destinés aux organismes LGBTQ2. On espère voir encore plus de financement dans le futur. On ne va pas délaisser les communautés qu’on a commencé à financer à un bon niveau.

    Dans votre parcours politique, avez-vous déjà été discriminé parce que vous étiez
    LGBTQ+ ?

    Randy Boissonnault : Jamais. J’ai commencé mon parcours sur la colline Parlementaire en 2015 comme seul homme ouvertement gai à me présenter comme député. Imaginez : en Alberta, ça n’a jamais été une question, en 2015 ! J’ai même déjà répondu, dans une entrevue, à quelqu’un qui me demandait comment je m’identifiais : « Je suis un candidat qui est gai, je ne suis pas le candidat gai ! »

    Ça, c’est 7 % de qui je suis. Like, come on! J’ai un autre 93 % de moi : j’ai fait le Triathlon Ironman, j’ai monté une entreprise pendant 20 ans, j’ai été boursier Rhodes, je suis un partisan de la philanthropie… Comme ma collègue la ministre Joly a déjà dit : « Il faut se regarder sous toutes ses identités. » Parce que je suis également le premier membre franco-albertain du cabinet fédéral. Je viens de l’Alberta rurale, pas d’une ville : je suis député maintenant pour une ville, mais j’ai grandi à Morainville, un petit village d’environ 10 000 personnes.

    Le Québec semble trouver l’Alberta, et plus particulièrement ses régions rurales, plus
    hostiles aux LGBTQ+ ? Partagez-vous ce constat ?

    Randy Boissonnault : On ne peut pas définir d’une brosse les régions rurales. Il y a des ruralités, des collectivités qui sont très ouvertes. J’ai assisté pendant la pandémie — de façon virtuelle — à la première Fierté à Innisfail, entre Red Deer et Calgary. C’est un village agricole. Mais là ils avaient des drags, des festivals, des jeunes, des ainés… Autre exemple : ma première relation. Mon conjoint venait de Lacombe [village au nord de Red Deer, NDLR] et il vivait dans une famille vraiment ouverte, où il n’y avait aucune difficulté. Je ne pense pas qu’on peut définir toute une région. Il faut continuer à faire du travail. Il faut continuer à aider des organismes sur le terrain, et il faut valoriser toutes les personnes, peu importe qui ils aiment.

    *Outre Randy Boisonneault, trois autres député.e.s libéraux sont ouvertement LGBTQ2E+ (Seamus O’Regan, Rob Oliphant et Pascale St-Onge), deux sont néo-démocrates (Blake Desjarlais et Randall Garrison) et deux sont conservateurs (Eric Duncan et Melissa Lantsman).

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