La série Grease : Rise of the Pink Ladies constitue sans aucun doute l’une des belles surprises de la rentrée, même si son arrivée s’est faite au son des grincements de dents de certain.e.s bien-pensant.e.s qui l’ont accusée de corrompre la « pureté » du film de 1978. Rien n’est pourtant moins vrai puisqu’elle s’en veut à la fois un hommage et une excellente relecture !
La série se déroule en 1954, soit quatre ans avant l’action du film iconique mettant en vedette Olivia Newton-John et John Travolta. On y suit quatre étudiantes de l’école secondaire Rydell qui, chacune à leur manière, font face à l’intolérance de leurs pairs et à des rêves qui semblent inaccessibles. Dès le premier numéro musical, le ton est donné à travers une reprise époustouflante de la chanson « Grease Is the Word », qui établit les relations et les enjeux des différentes cliques de l’école, incluant celle des marginaux (lire LGBTQ+), qui se fait sur les paroles suivantes : « We start believing now that we can be who we are (On peut commencer à croire qu’on peut enfin être ce que l’on est) ».
Jane Facciano (Marisa Davila), interprète une latina en amour avec l’athlète de l’école jusqu’au moment où, double standard oblige, elle se voit accoler l’étiquette de Marie-couche-toi-là. L’acteur trans Ari Notartomaso incarne Cynthia, un personnage non binaire rejeté tant par les gars que les filles. Olivia (Cheyenne Isabel Wells) est confrontée à une famille hispanique surprotectrice et une réputation ternie après avoir fréquenté son prof d’anglais. Finalement, Tricia Fukuhara interprète Nancy, une aspirante styliste sinoaméricaine qui porte un regard plus que blasé sur les hommes.
Face à l’opprobre, les jeunes filles fondent les Pink Ladies et la série relate leurs combats et alliances, notamment avec les T-Birds (les blousons noirs un peu machistes de l’école). La série traite habilement du regard porté sur la différence, que ce soit en matière de harcèlement, de rejet, d’orientations sexuelles, de notions de genre ou de l’obligation imposée aux femmes d’être des « dames », avant toute chose.
Créé par Annabel Oakes, chaque épisode comporte de multiples numéros musicaux, dont certaines reprises de la comédie musicale, auxquels s’ajoutent 40 nouveautés composées par Justin Tranter (auteurs-compositeurs de Britney Spears, Justin Bieber, Demi Lovato et Selena Gomez) et parmi lesquelles des thèmes liés à la sexualité, au racisme et aux notions de genre sont ouvertement abordés.Le résultat est irrésistible et met efficacement en scène une génération du baby-boom déchirée entre un statu quo rassurant et un fulgurant désir de modernité. Les numéros de danse sont bien rythmés et font souvent preuve d’audace au cœur de mises en scène inventives, dont la très amusante balade (épisode 2) « Imagine a World Without Boys ».
Quant aux accusations de wokisme exacerbé, on peut souligner que le film de 1978, malgré tout son charme, présentait une vision particulièrement monolithique, blanche et irréaliste de la réalité. Les producteurs de la série ont d’ailleurs souligné avoir consulté les annuaires du sud de la Californie des années 1950, incluant celui de l’école même où le film Grease fut tourné. Le résultat est révélateur puisqu’il renvoie une réalité très diversifiée composée d’adolescent.e.s caucasien.ne.s, afro, sino et latino-Américain.e.s. La série se veut un véhicule idéal, à l’instar du bolide de la chanson « Grease Lightning », permettant de raconter les années 50 tout en y incluant, cette fois-ci, ceux et celles qui ont trop longtemps été mis.e.s sur la touche.
INFOS | La série de 10 épisodes est présentée, en anglais, sur Paramount+ via PrimeTV.