De l’interdiction des thérapies de conversion à la levée de la période d’abstinence pour les homosexuels souhaitant faire un don de sang, le mandat de Justin Trudeau, qui se sera échelonné sur une décennie, a été marqué par des avancées pour les personnes LGBTQ+, qui étaient attendues depuis longtemps. Mais certains défis persistent, alors que des déceptions ont été partagées et que de nouveaux problèmes émergent.
« Les voies ensoleillées », avait promis Justin Trudeau lors de son élection comme premier ministre en 2015. Dans les années qui ont suivi, le député de Papineau a multiplié ses apparitions lors d’événements LGBTQ+, et plus particulièrement lors des marches de la Fierté de nombreuses villes.
« J’ai trouvé en Justin Trudeau un allié exemplaire. Par ses gestes concrets et ses paroles inspirantes, il a contribué à bâtir une société plus juste et égalitaire. Son leadership a nourri mon engagement personnel, ainsi que celui de nos communautés », souligne ainsi Patrick Desmarais, président de la Fondation Émergence, dans une publication partagée au début janvier.

« Tout au long de son mandat, il s’est distingué comme un allié remarquable des communautés 2SLGBTQIA+, renforçant la position du Canada comme chef de file mondial en matière de droits humains et d’inclusion », résume-t-il, rappelant au passage que le 23e premier ministre du Canada a gagné en 2016 le prix Laurent-McCutcheon de l’organisation, « en reconnaissance de son engagement exceptionnel contre l’homophobie et la transphobie, ainsi que pour son soutien indéfectible envers nos communautés ».
De nombreuses mesures à son actif
C’est sous Justin Trudeau que fut institué ce que l’on appelle aujourd’hui le Secrétariat
2ELGBTQI+ et que sera aussi lancé le premier Plan d’action fédéral 2ELGBTQI+ au Canada.
Le gouvernement Trudeau aura tenté de mettre fin à certains chapitres douloureux de l’histoire LGBTQ+ du pays. En 2017, le premier ministre au nom du gouvernement canadien s’excuse aux personnes ayant survécu à la Purge LGBT et aux groupes des communautés 2ELGBTQI+. En 2019, le Parlement met aussi fin aux infractions relatives à la pénétration anale, au vagabondage et aux maisons de débauche. Puis, en 2022, la Chambre des communes adopte à l’unanimité la loi interdisant les thérapies de conversion au Canada. Cette même année, Ottawa met aussi fin aux délais prévus spécifiquement pour les hommes ayant eu des relations homosexuelles en ce qui a trait au don de sang.

Des avancées ont aussi été faites concernant l’identité de genre. En 2017, l’identité de genre et l’expression de genre se voient désormais protégées en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Quelques années plus tard, le Canada est devenu le premier pays du monde à recenser sa population trans et non binaire.
Au pays comme sur le plan international, face à Danielle Smith ou à Giorgia Meloni, le premier ministre Justin Trudeau n’hésite pas à critiquer des mesures qu’il considère comme étant anti-LGBTQ+. En outre, l’ère Trudeau aura aussi été marquée par une présence LGBTQ+ au sein du cabinet des ministres, avec la nomination du Franco-Albertain Randy Boissonnault, premier député ouvertement homosexuel de sa province, au poste de ministre du Tourisme, puis ministre de l’Emploi et des Langues officielles.
La Québécoise Pascale St-Onge a, quant à elle, été au poste de ministre des Sports, puis ministre du Patrimoine canadien. Cette dernière est devenue de ce fait la première femme ouvertement lesbienne à être ministre au fédéral. Elle est aussi devenue la première ministre ouvertement lesbienne à prendre un congé parental.
Ayant dirigé de nombreux ministères, dont celui du Travail, des Services aux Autochtones et des Ressources naturelles, le Terre-Neuvien Seamus O’Regan a aussi fait partie du cabinet le plus queer de l’histoire du pays.

La fin de la criminalisation du VIH, talon d’Achille
Mais avec un bilan politique viennent presque inévitablement des critiques, ou, du moins, quelques défis et problèmes qui persistent. « Le gouvernement du Canada est conscient qu’il reste du travail à faire pour que chacun puisse être soi-même, de façon libre et authentique », a admis lui-même le gouvernement dans une déclaration datant de 2022. En novembre dernier, le gouvernement du Canada a communiqué à la Coalition canadienne pour réformer la criminalisation du VIH (CCRCV) sa décision d’abandonner tout projet de réforme législative concernant la criminalisation du VIH. Une telle annonce a pourtant suivi après des années de discussions avec Ottawa, qui avait d’ailleurs promis des mesures de réforme concrètes. « Le droit pénal actuel en ce qui a trait à la non-divulgation réprime trop durement les personnes vivant avec le VIH et le sida et les stigmatise, ce qui les décourage de se faire soigner et dépister », avait indiqué le premier ministre Justin Trudeau dans une déclaration partagée à la fin 2023.
La criminalisation du VIH décrit l’application injuste du droit pénal contre les personnes vivant avec le VIH sur la seule base de leur statut sérologique. Ceci comprend l’application de dispositions pénales spécifiques ou l’application du droit pénal général pour poursuivre des personnes vivant avec le VIH pour transmission involontaire du VIH, exposition perçue ou éventuelle au VIH et/ou non-divulgation du VIH par une personne qui connaît son statut.