Mercredi, 2 octobre 2024
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    Décès de Pierre-Paul Savoie

    L’homme était discret, le chorégraphe bouillonnant d’idées, jouant de toutes les palettes de son talent qui dépassent de loin la danse tant il était passionné par toutes les formes d’expression mais aussi par les rencontres et par les collaborations. Pierre-Paul Savoie nous a quittés en cette fin janvier sombre et l’ensemble de la rédaction de Fugues se joint à nous pour présenter nos condoléances à sa famille, ses ami.e.s et bien sûr à son conjoint Arnold. 

    En 1993, Pierre-Paul Savoie, en collaboration avec Jeff Hall, crée un petit tsunami dans le milieu de la danse à Montréal avec la présentation de Bagne. Une pièce pour deux danseurs qui se trouvent séparés par des grilles et qui cherchent à se rejoindre. Un univers pénitentiaire qui par la même démarche renvoie à l’univers de Jean Genet tel qu’il l’avait transfiguré dans son unique film comme réalisateur, Un chant d’amour. Comment exister dans un univers clos et extrêmement codé où tout écart est vécu comme une transgression, une rébellion. Comment trouver à travers la dureté des rapports entre prisonniers et gardiens un peu de repos, de tendresse, de sérénité, voire d’amour. Pierre-Paul Savoie ont osé faire tomber toutes les grilles étouffantles êtres et la danse contemporaine en puisant leur inspiration ailleurs que dans les sentiers battus. Entre danse, acrobatie, et lutte, une bande sonore et une musique qui tranchent, la lumière qui joue du clair obscur, tout participe à la narration de cette rencontre entre deux hommes qui à défaut de trouver la liberté, cherchent leur propre liberté au-delà des conventions. Une œuvre magistrale qui résume bien la vision pour les deux chorégraphes et danseurs de leur vision de l’art. 

    Bagne représenté de nouveau en 2015 avait été revisité par les deux créateurs. Pierre-Paul Savoie trouvait avec le recul «que la trame dramatique n’avait pas atteint son plein potentiel»[1]. Les deux hommes s’étaient entourés de nouveaux concepteurs et avaient choisi deux jeunes danseurs pour reprendre leur rôle. Bagne re-création 2015 n’était donc qu’un prolongement, un approfondissement du premier Bagne original qui a marqué les esprits de nombreux spectateurs dont notre confrère André C. Passiour qui se rappelle que «cétait un privilège, à l’époque, de voir la toute première version de «Bagne».. On s’asseyait dans la salle et on voyait cette grande cage qui servait à illustrer le milieu carcéral. C’était à la fois rude, brute et sensuel. Les corps se réunissaient et se séparaient comme dans une sorte de ballet à la fois brutal – tout comme l’est le milieu des prisons – et hautement poétique. Il y avait aussi la nudité masculine qui n’était pas courante à ce moment-là en chorégraphie au Québec. C’était très avant-gardiste pour l’époque ! On sentait cette passion brûlante entre les protagonistes». 

    Tout au long de sa carrière, Pierre-Paul Savoie, refusera de s’enfermer dans les limites qu’imposent trop souvent une discipline définie, construisant des ponts entre différents arts de la scène, provoquant des rencontres avec d’autres artistes pour créer des œuvres collectives, multiples et riches. Que l’on pense à Danse Lhasa Danse (2011), Les chaises (2013) ou encore Corps Amour Anarchie / Léo Ferré (2016).

    Pour l’avoir souvent rencontré, ou eu en entrevue, Pierre-Paul Savoie séduisait par sa simplicité, sa générosité et son grand amour de la vie, des autres. Et s’il cherchait, comme tant d’autres, l’inatteignable étoile, il faisait que sa quête soit collective.

    Comme le conclut mon collègue André C. Passiour : « On vient de perdre un grand chorégraphe, quelqu’un de simple, de très créatif et imaginatif et d’une grande sensibilité en la personne de Pierre-Paul Savoie».

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