Dimanche, 19 janvier 2025
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    Le Canada a son cabinet le plus queer de l’histoire… le travail peut commencer

    Alors que les nouveaux ministres emménagent dans leurs bureaux et embauchent du personnel, ils commencent également à se familiariser avec leurs dossiers et ont sans doute déjà reçu leurs lettres de mandat du premier ministre. Au moment où vous lirez ces lignes, le parlement aura débuté la première session de la 44e législature. On peut se réjouir de compter trois ministres ouvertement LGBTQ+ qui devraient être instrumentaux dans l’adoption des promesses de la plateforme libérale concernant les enjeux LGBTQ+. Il faut s’attendre à ce que certains dossiers épineux se présentent dans les assiettes de ces trois ministres en fonction.


    Maintenant ministre du Travail, Seamus O’Regan sera en charge de faire appliquer l’obligation d’une double vaccination dans tous les lieux de travail sous réglementation fédérale, ainsi que de la mise en œuvre des 10 jours de congé de maladie payés dans ces mêmes lieux de travail. Ceci représente environ 6% de la main-d’œuvre totale du pays, principalement dans les domaines des transports, des télécommunications et des banques. Comme certains syndicats s’engagent à protéger leurs membres hésitants face à la vaccination — comme ç’a été le cas pour les employé.e.s de la santé au Québec —, il faut envisager quelques points de friction pour Seamus O’Regan dans les mois à venir.

    Randy Boissonnault s’est vu confier à la fois le rôle de ministre du Tourisme et le poste de ministre adjoint des Finances (qu’on appelait autrefois le «ministre de la prospérité de la classe moyenne»). Avoir Boissonnault à ce double poste signifie que les préoccupations des communautés queer et trans seront probablement entendues au plus haut niveau. Rappelons qu’en 2016, Randy Boissonnault était devenu conseiller spécial du Canada auprès du premier ministre sur les enjeux liés à la communauté LGBTQ+. À ce titre, il a travaillé en collaboration avec des organisations de partout au pays afin de promouvoir l’égalité pour la communauté LGBTQ+, de protéger les droits de ses membres et de lutter contre la discrimination à leur encontre.

    Pascale St-Onge

    Plus que jamais, le tourisme a le potentiel d’être un dossier très politique. À l’échelle mondiale, le tourisme a été l’une des premières industries affectées par la pandémie; elle sera aussi l’une des dernières à pouvoir reprendre son rythme à plein régime. Pilier de l’économie canadienne qui génère annuellement 102 milliards de dollars et qui représente 4% de tous les emplois (soit l’équivalent de 1,8 million de travailleurs), le tourisme est un vecteur de diversification et de développement économiques majeurs. Boissonnault aura la tâche ardue d’aider à la reconstruction d’un secteur décimé par la pandémie. Dans son rôle de ministre adjoint des Finances, Boissonnault sera une voix pour la diversité autour de la table lorsque le budget fédéral sera décidé. Dans le dernier budget, nous avons vu non seulement un financement dédié pour les organisations LGBTQ+ à travers le Canada, mais aussi le travail du Secrétariat LGBTQ2, qui finalise son plan d’action maintenant que les consultations sont terminées. Le budget comprenait également une analyse comparative entre les sexes ainsi que des déclarations sur les défis et les obstacles rencontrés par les communautés queer et trans que le gouvernement cherche à résoudre.

    La nouvelle ministre Pascale St-Onge, quant à elle, s’est vu confier les portefeuilles des sports et de l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec. Ancienne syndicaliste (et musicienne – elle a été bassiste du groupe Mad June), Pascale St-Onge est également la première femme ouvertement lesbienne à être ministre au parlement fédéral. Ce n’est pas rien. Rappelons que par le passé, le dossier des sports s’est avéré un bon tremplin au cabinet pour les nouveaux ministres. En tant que ministre des Sports, St-Onge devra répondre aux questions sur la participation du Canada aux Jeux olympiques qui se dérouleront à Pékin, dans moins de 3 mois, à partir du 4 février 2022. La question d’un éventuel boycott, cependant, ne semble plus être à l’agenda, s’il faut en croire les déclarations du chef de la direction du Comité olympique canadien David Shoemaker fin octobre : «Le sport est un outil extrêmement puissant et important. Les athlètes canadiens peuvent faire beaucoup plus en se présentant à ces Jeux d’hiver qu’en ne s’y présentant pas.»

    Dans le rôle de ministre responsable de l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, Pascale St-Onge agira comme porte-parole des régions rurales du Québec, des régions où les voix queer et trans ne se font pas entendre souvent parce qu’une grande partie de l’accent a tendance à être mis sur les personnes LGBTQ+ en milieu urbain.

    Avec un cabinet plus queer que jamais, les questions LGBTQ+ sont plus susceptibles de rester dans les priorités des libéraux de Trudeau. Nous savons déjà qu’une interdiction nationale des pratiques des thérapies de conversion sera l’un des premiers projets de loi déposés une fois le Parlement convoqué. Malheureusement, malgré toutes les bonnes intentions, il est peu probable que le projet de loi soit adopté avant le Nouvel An étant donné qu’il y a moins de quatre semaines de séance prévues avant les vacances d’hiver, et les comités permanents ne seront surement pas opérationnels pendant cette période. Il reste la possibilité que le gouvernement dépose le projet de loi et essaie ensuite de faire adopter une motion de consentement unanime pour l’adopter à toutes les étapes, en faisant prévaloir qu’il avait déjà été adopté à la Chambre lors de la législature précédente. Toutefois, il est peu probable que les députés du parti conservateur, qui ont voté contre la dernière fois, permettent l’adoption accélérée d’une telle motion.

    Randy Boissonnault

    Rappelons que les libéraux se sont engagés à verser 40 millions de dollars au cours de
    l’exercice pour les communautés queer et trans. Ceci signifierait soit que les fonds seraient inclus dans le budget supplémentaire des dépenses voté une fois le Parlement convoqué, soit que ce serait dans le cadre de la prochaine mise à jour économique de l’automne, qui peut ou non être adoptée avant les vacances d’hiver. On ne sait pas encore quel mécanisme sera privilégié. Ce financement viendra compléter les 7,1 millions de dollars déjà investis pour soutenir le travail du Secrétariat LGBTQ2 et les 15 millions de dollars du budget 2021 pour le nouveau Fonds de projets LGBTQ2. On aura prochainement plus de détails lorsque de nouvelles lettres de mandat seront émises. L’intention des libéraux est de travailler en collaboration avec les communautés LGBTQ2.

    Le gouvernement a fait beaucoup de promesses aux communautés queer et trans, et même s’il dit que les personnes LGBTQ+ sont des priorités, il s’est engagé à déposer les projets de loi dans les 100 premiers jours du Cabinet, pas nécessairement de les adopter dans ce laps de temps. C’est une stratégie pratique, car la Chambre des communes ne siègera pas pendant la grande majorité de ce temps. Ce qui signifie que les communautés LGBTQ2S+ devront continuer d’exercer de la pression pour que ces projets de loi soient adoptés rapidement car, avec un gouvernement minoritaire, l’opposition conservatrice peut toujoursralentir leur adoption.

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