Samedi, 20 avril 2024
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    Loi contre la « propagande LGBT » : jusqu’à quand les drag queens russes seront-elles sur scène ?

    Malgré des lois de plus en plus répressives contre la communauté LGBTQI+, les drag show se poursuivent en Russie.

    Dans l’arrière-salle d’un bar de Moscou, au milieu de palettes de maquillage et de costumes étincelants, un groupe de drag queens se prépare à monter sur scène, pour ce qui pourrait bien être l’un de leurs derniers spectacles.

    Le 24 novembre, les autorités russes ont approuvé une loi sur la « propagande LGBT » qui pourrait rendre illégales ces représentations, accentuant la pression sur une communauté LGBT+ marginalisée depuis des années en Russie.

    Mais en attendant l’orage, l’ambiance est étonnamment festive dans ce bar moscovite, et l’énergique organisatrice de ce show, Margot Mae Hunt, robe blanche et grandes plumes dans sa perruque blonde, y est pour beaucoup.

    « C’est tellement génial! On s’amuse! L’ambiance est super chaleureuse », lance Margot aux interprètes réunis autour d’elle, les mains posées sur les siennes. « Aujourd’hui, mes chéris, profitons-en ! leur dit-elle.

    Si la jeune femme tient tant à vivre l’instant présent, c’est que ce spectacle baptisé « Draglesque Brunch », associant artistes burlesques et drag queens, pourrait bientôt être interdit.

    La chambre basse du Parlement russe, la Douma, doit prochainement voter en seconde lecture des amendements élargissant considérablement une loi décriée datant de 2013 et visant à « protéger » les enfants contre la « propagande » LGBT+.

    Cette initiative intervient au moment où le président Vladimir Poutine s’est raidi dans la défense des valeurs qu’il qualifie de « traditionnelles », en pleine tournure conservatrice accompagnant son attaque militaire en Ukraine.

    Une guerre idéologique
    « L’impact que pourrait avoir cette loi n’est pas clair pour le moment (…) On essaie de ne pas y penser », raconte l’une des drag queens du groupe, Skinny Jenny, tenant un vaporisateur de sa main gantée de blanc .

    Skinny Jenny, vêtue d’une robe à fleurs, d’une élégante écharpe blanche et de perles, pense qu’elle et ses collègues n’ont pas à avoir honte.

    « Tout ce que nous faisons, c’est mettre en valeur l’art du travestissement, qui existe depuis des années et des années. Pas seulement à l’étranger, mais aussi en Russie », a déclaré à l’AFP l’artiste de 26 ans.

    « Ce dont nous avons besoin en ce moment, c’est d’une dose de vie, de beauté, de bonheur, d’amour », déclare l’organisatrice Margot Mae Hunt. « C’est exactement le but du burlesque. »

    Mais il n’est pas facile de rester optimiste, alors que les personnes LGBT+ sont dans le collimateur des autorités, qui ont qualifié plusieurs associations et militants d’ »agents étrangers », un statut infâme.

    La situation s’est encore aggravée après le lancement de l’offensive contre l’Ukraine en février, les autorités présentant la loi plus sévère sur la « propagande » LGBTQ+ comme un acte de défense dans une guerre idéologique contre les Occidentaux.

    « L’opération militaire se déroule non seulement sur le champ de bataille, mais aussi dans l’esprit des gens », a déclaré le député pro-Poutine Alexander Khinchtein, l’un des auteurs du texte.

    « Continuer clandestinement » 
    En vertu des derniers amendements proposés, les personnes reconnues coupables de « propagande » LGBT+ seront passibles de lourdes amendes et jusqu’à deux ans de prison.

    Cette nouvelle menace plane dans l’esprit des dizaines de clients des bars qui attendent avec impatience l’apparition des drag queens sur scène, annoncée par le tube « I’m Coming Out » de Diana Ross.

    Dans le public, Marie, 37 ans, apprécie « l’ambiance chaleureuse et confortable, la bonne humeur et l’humour ». 

    Mais elle pense aussi à la nouvelle loi, qui « apporte la peur, la confusion et l’indignation ». « J’ai l’impression que chaque émission pourrait être la dernière », a-t-elle déclaré à l’AFP.

    Soudain, Skinny Jenny apparaît sur scène et se lance dans un numéro « lip-sync », qui consiste à faire semblant de chanter. Une autre drag queen, Kamilla Crazy-White, lui succède, juchée sur d’impressionnants talons compensés.

    « Est-ce vraiment le problème le plus pressant en Russie ? demande Margot Mae Hunt en regardant le public rire.

    « Je veux vraiment espérer le meilleur, mais nous nous préparons au pire », poursuit-elle. Si ses spectacles sont interdits, elle a déjà tout prévu : « On va les organiser clandestinement et on entrera encore plus dans la légende ! ».

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