Mardi, 22 avril 2025
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    Panser nos déceptions amicales grâce à Samuel Larochelle

    L’auteur et journaliste Samuel Larochelle est décidément une machine à écrire ! En mars, celui dont on peut retrouver les articles et chroniques dans les pages de ce magazine a dévoilé Une amitié à la dérive, un nouveau livre où il explore les difficultés liées aux amitiés déséquilibrées. Un retour pour Samuel Larochelle à la collection UNIK d’Héritage jeunesse, lui qui y avait déjà publié, en 2021, Combattre la nuit une étoile à la fois.

    Bien que la littérature jeunesse soit universelle, qu’est-ce qui t’a poussé à écrire ton livre en format jeunesse ?
    Samuel Larochelle : J’ai déjà songé à aborder toutes les questions relatives à l’amitié dans un livre comme J’ai échappé mon cœur dans ta bouche ou J’ai déjà fait sourire un douanier, parce que ça aurait pu s’y prêter, mais ça m’aurait poussé à parler très clairement, avec vulnérabilité, un peu d’effronterie et d’humour, de relations qui existent encore, alors que de parler de mes voyages passés et de mes relations passées, il y a une forme de détachement, de « c’est pas grave si ça brusque quelques personnes ! », alors que mes amis je veux en prendre soin.

    La collection dans lequel le livre est publié, UNIK, on est beaucoup d’auteurs de la communauté — comme Jonathan Bécotte, Gabrielle Boulianne-Tremblay, Julien Leclerc — à avoir écrit pour cette collection. Il faut qu’on se base sur notre vécu ou sur des vraies réflexions personnelles, des vraies émotions. Puis l’amitié génère tellement d’émotions chez moi que je savais que ça allait beaucoup m’inspirer. C’est une collection pensée pour les ados, mais assurément assez forte pour les adultes. On parle d’un sujet qui touche autant les jeunes que les adultes : comment protéger ses amitiés ? Comment faire le deuil d’une amitié ? Comment accepter ou non qu’on ne s’investit pas de la même façon ?

    Toi qui as dû faire un travail d’introspection, es-tu en mesure de nous aider à « affronter » ce genre de situation d’insatisfaction amicale ?
    Samuel Larochelle : C’est récent que je commence à mieux gérer ça, et c’est un de mes enjeux. Je n’ai vraiment pas fini de cheminer là-dedans. Je vis géographiquement très loin de ma famille, célibataire, sans enfant. J’arrive à mener mes 1000 projets professionnels sans que ça prenne toute la place dans ma vie, donc j’ai beaucoup de temps à consacrer à mes amis, qui n’en ont pas toujours autant. J’ai besoin de me parler, de me rappeler que ce n’est pas contre moi, que quand je propose, la personne va accepter, qu’elle s’intéresse encore à moi, qu’elle m’aime encore. Il faut que je me le rappelle. Les choix que l’autre fait ne sont pas nécessairement contre toi, c’est juste qu’ils ne sont pas capables de mener leur vie en faisant partie de la tienne. Cette phrase-là est une phrase clé pour gérer les tourbillons de l’amitié, mais elle n’est pas facile à appliquer.

    Penses-tu que les personnes LGBTQ+ ont plus tendance à être confrontées à ce genre de situation ?
    Samuel Larochelle : Complètement. Je pense que l’on est nombreux à faire de nos amis le centre de nos vies. Donc, quand ces relations-là se fragilisent, ça devient confrontant et très fréquent chez les queers. On est souvent dans la famille choisie, sans avoir été exclu de notre famille de sang. On a réalisé que nos amis nous comprennent davantage — parfois — que notre famille, à cause de nos personnalités ou parce que nos trains de vie ne sont pas le même.

    À l’instar des autres livres de cette collection, ton livre contient un visuel très particulier et original, une calligraphie qui reflète et accompagne tes propos. Est-ce que c’est un défi ?
    Samuel Larochelle : Les deux livres que j’ai faits dans cette collection-là m’ont emmené ailleurs. Quand j’ai écrit Combattre la nuit une étoile à la fois, c’était la première fois que j’écrivais du vécu, la première fois que j’écrivais de la poésie jeunesse, où tu racontes une histoire et ce n’est pas juste des poèmes isolés. J’ai apprivoisé ça et ça a eu un impact sur comment j’ai fait mes romans graphiques, Le plus petit sauveur du monde 1 et 2. Je pense que s’ils ont été si bien écrits, c’est parce qu’ils ont ouvert une porte dans mon cerveau grâce à Combattre la nuit une étoile à la fois. C’est de la haute voltige d’écrire des affaires de même. C’est comme un condensé d’émotions et de pensées avec des images originales, mais infiniment accessibles. Cet équilibre-là est hyper difficile à trouver.

    Tu as fondé en 2021 le Cabaret Accents Queers, et il y a encore des spectacles en 2025…

    Samuel Larochelle : On a la 9e édition à Montréal le 4 avril. On s’en va pour la première fois à Sudbury au Salon du livre francophone le 8 mai. On va pour la quatrième fois à Québec le 10 mai et ensuite on fait une mini tournée — pour la première fois — à Mont-Laurier le 15 mai, à Val-d’Or le 16 mai et à Rouyn-Noranda le 17 mai. C’est pas les mêmes artistes qui font tous les shows. Je suis le chauffeur, le producteur, l’animateur, un des artistes qui performent sur scène, après le show, je ramène les gens à l’hôtel ou dans leur ville… C’est beaucoup, beaucoup d’énergie !

    Comment te sens-tu à l’approche de ces spectacles ?
    Samuel Larochelle : En soi, ça me ravit, avec toutes les attaques contre les communautés queers, d’avoir autant d’événements dans des grandes et des petites villes pour faire vibrer la queerness, faire entendre nos histoires, nos rires, nos pleurs et nos rêves, c’est encore plus important que jamais.
    Je n’ai pas l’impression que c’est infiniment lourd. J’ai environ 50 shows à mon actif, que j’ai produits et animés, donc je suis rodé maintenant. Les réflexes sont aiguisés et je sais quoi faire. Ce n’est pas reposant, mais ce n’est pas étourdissant.

    Ton Cabaret Accents Queers prenant de l’ampleur au fil des années, te vois-tu en faire une occupation principale ? Agrandir la production ?
    Samuel Larochelle : Est-ce que dans 5, 10 ou 15 ans, si j’ai une renommée qui me permet de remplir une salle en solo, j’aimerais mélanger moi qui chante, moi qui lis des textes, moi qui livre des numéros d’humour ? Oui, ce sera un fantasme à long terme.

    Mais, présentement, faire des cabarets, c’est premièrement avoir une connexion avec le public — qui est comme une drogue —, deuxièmement créer des lieux où on célèbre la queerness avec la moitié de la salle qui est queer et l’autre moitié qui est hétéro et tout le monde qui trippe ensemble, et troisièmement, que le public connaisse de plus en plus de personnalités queers. Je veux comme servir d’amplificateur à ces artistes, parce que plus on va être nombreux à se faire entendre, plus on va être puissants dans notre façon de résister.

    INFOS | Cabaret Accents Queers : 4 avril à l’Usine C.
    Une amitié à la dérive, de Samuel Larochelle, Unik, 2025 , 120 pages.

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