Dimanche, 5 mai 2024
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    Sous pression, la principale ONG de défense des LGBT+ en Russie ne lâchera pas

    Ajoutée à liste des «agents de l’étranger», la principale ONG LGBT+ de Russie s’attend à ce que son action devienne encore plus compliquée, mais elle refuse de «lâcher» face aux autorités.

    L’ONG LGBT-Set (Réseau LGBT, en russe) vient depuis 2006 en aide aux minorités sexuelles aux quatre coins de la Russie, notamment en Tchétchénie, où les autorités leur sont particulièrement hostiles.

    La semaine dernière, le groupe, basé à Saint-Pétersbourg, a été classé zagent de l’étranger», ce qui l’oblige à faire connaître ce statut de quasi-paria dans toutes ses publications, y compris sur les réseaux sociaux, et à se plier à de fastidieuses démarches administratives sous peine de sanctions pénales.

    «Tout cela, bien évidemment, est fait pour compliquer notre travail» et «effrayer les gens» qui voudraient solliciter l’aide de l’ONG, déclare Svetlana Zakharova, directrice de la fondation Sféra qui pilote les opérations de LGBT-Set.

    L’organisation est habituée à l’hostilité des autorités et d’une partie de la population. Ainsi, Svetlana Zakharova n’ouvre la porte du bureau aux visiteurs qu’après vérification téléphonique. Si rien n’a changé à première vue dans les locaux de l’ONG, où des militants pianotent sur les claviers de leurs ordinateurs entourés de drapeaux aux couleurs de l’arc-en-ciel accrochés aux murs, Svetlana Zakharova est inquiète pour ses bénéficiaires.

    Après la classification de LGBT-Set en tant qu’«agent de l’étranger», certaines personnes, notamment celles qui zont besoin d’un soutien psychologique», pourraient «hésiter à s’adresser à l’organisation», remarque-t-elle. Cette mesure intervient dans un contexte de répression croissante des organisations de la société civile perçues comme en rupture avec la ligne du président Vladimir Poutine, qui se pose en héraut des valeurs conservatrices et traditionnelles face à l’Occident présenté comme «décadent».

    Le mois dernier, le président russe s’en était par exemple pris aux pays occidentaux qui «enseignent dès le plus jeune âge qu’un garçon peut aisément devenir une fille, ou l’inverse», une «chose monstrueuse».

    Cruel et cynique
    En 2013, Moscou a voté une loi controversée contre la «propagande» homosexuelle auprès des mineurs, qui a servi de prétexte pour interdire des marches des fiertés et l’affichage de drapeaux arc-en-ciel, étendards des communautés LGBT+. Mercredi, les autorités se sont appuyées sur cette loi pour infliger une amende à la chaîne de télévision musicale Mouz-TV, qui avait diffusé une vidéo montrant des hommes vêtus de robes et d’autres célébrant un fausse cérémonie nuptiale.

    Depuis 2020, la Constitution russe précise que le mariage est une union entre un homme et une femme, interdisant de fait les unions de personnes de même sexe.

    En ciblant «LGBT-Set», le gouvernement s’en prend à un symbole des milieux LGBT+ en Russie. Signe de l’émoi suscité, Amnesty Intenational a dénoncé la semaine dernière la «persécution assumée, cruelle et cynique» de cette ONG, qui s’est aussi fait un nom en soutenant les minorités sexuelles en Tchétchénie. La situation est en effet particulièrement difficile dans cette république russe du Caucase dont le dirigeant, Ramzan Kadyrov, persécute les homosexuels. Le journal d’opposition russe Novaïa Gazeta et plusieurs ONG ont révélé en 2017 que des gais étaient arrêtés et parfois torturés et assassinés par la police en Tchétchénie.

    En février dernier, LGBT-Set avait dénoncé l’arrestation de deux hommes tchétchènes, ensuite transférés dans des conditions troubles en Tchétchénie où les autorités les accusent désormais de complicité avec une rébellion armée. Aider les LGBT+ tchétchènes «a toujours été dur, mais on va continuer ce travail, on ne lâche pas», lance Svetlana Zakharova. Selon elle, ces mesures de rétorsion démontrent avant tout que les autorités russes redoutent toute forme d’activisme et que «le pouvoir a peur».

    La désignation de l’ONG comme «agent de l’étranger» ne semble en tout cas pas avoir entamé le moral des troupes. «On peut soit avoir peur, soit travailler», lance Nina Popougaïeva, une militante, tasse arc-en-ciel posée sur son bureau. «Moi, je préfère travailler».

    Rédaction avec AFP

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