Le 30 janvier dernier, à Saint-Hyacinthe se tenait la Journée arc-en-ciel organisée par le JAG, le seul groupe LGBTQ+ pour toute la Montérégie. Plus de 200 personnes provenant d’autant de groupes y ont participé pour contrer l’homophobie et la transphobie dans cette région au sud de la métropole. Courriels de menaces de mort, manifestation anti heure du conte de la drag queen Barbada à Ville Sainte-Catherine, etc., les incidents homophobes et transphobes se multiplient et les langues se délient avec, en toile de fond, une discrimination toujours plus claire et plus assumée qu’on ne voyait pas auparavant. Qu’à cela ne tienne, on se mobilise autour du JAG pour l’appuyer et soutenir la communauté LGBTQ+ de la région.
Plus d’une dizaine de CDC (Corporation de développement communautaire) y participaient, ainsi que les gens de la Table régionale des organismes communautaires et bénévoles de la Montérégie (TROCM). « La montée de la violence, de l’homophobie et de la transphobie a fait céder la digue de protection qui était déjà fragile. Les victimes vivent l’éclatement des familles qui n’ont pas eu le soutien nécessaire, des professionnels qui sont désemparés, ne sachant plus comment intervenir, et trop souvent et de plus en plus, des Québécoises et des Québécois qui ont des idéations suicidaires, ou qui passent à l’acte irréversible aussi jeunes [qu’à] 14 ans ! », souligne Dominique Théberge, le directeur général de ce groupe communautaire, durant la conférence de presse qui a suivi cette rencontre de formation et de sensibilisation.
Pour Dominique Théberge, les intentions derrière les manifestations des derniers temps sont on ne peut plus précises : elles s’inscrivent contre la communauté LGBTQ+. « Il y a une détresse psychologique où des gens disent qu’ils ne trouvent plus leur place dans la société et que la seule solution est de se tuer parce que la société ne veut pas que j’existe […] », de souligner Dominique Théberge. Sur place, le directeur général du Conseil québécois LGBT, James Galantino, en entrevue sur Noovo, indique que les intervenant.e.s dans les classes ressortent bouleversé.e.s, déboussolé.e.s à la suite de leurs interventions, car « […] il y a de plus en plus de jeunes qui les confrontent, qui ont des propos violents, homophobes et transphobes, [ce qui] les affecte beaucoup mentalement ». Il faut donc trouver un moyen pour soutenir ces intervenant.e.s-là. « Il y a vraiment une montée de la détresse, il y en a qui perdent des ami.e.s en raison des manifestations, continue Dominique Théberge. On n’a pas vu ça depuis au moins une trentaine d’années. […] Lors des ateliers dans les classes, ce qui sort des propos de la bouche des élèves ne vient pas d’eux, mais plutôt de leurs parents ou de leurs proches. […]»
Il faut dire aussi que la mission du JAG est aussi vaste que son territoire : fondé dans les années 1996-1997, il s’agissait à l’époque de permettre à de jeunes gais et lesbiennes de se rencontrer pour échanger sur leur vécu, puis des services sont apparus si bien que, maintenant, on parle de rencontres individuelles ou de groupe, d’ateliers de formation et d’intervention dans des établissements scolaires, le tout offert dans trois points de services, soit à Saint-Hyacinthe, Longueuil et Salaberry-de-Valleyfield. Mais ce dernier est à présent fermé faute de budget et de personnel. « On a dû le fermer pour ne pas laisser un employé tout seul, indique Dominique Théberge qui a déjà siégé sur le conseil d’administration du groupe Jeunesse Lambda. […] Il nous manque environ 600 000 $ pour pouvoir le rouvrir et offrir correctement des services à la population. […]»
Le JAG rejoint ainsi de 6 000 à 7 000 personnes par an lors de ses nombreuses activités. En novembre dernier, le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, est passé dans les bureaux du JAG sans toutefois promettre quelque argent que ce soit pour venir en aide à l’organisme. « Il n’y a pas assez de services, pas assez de ressources dans la région pour aider les personnes LGBTQ+, dit Dominique Théberge. On vient de lancer la balle dans l’autre camp. On va voir comment le ministre [Carmant] va répondre à nos demandes [de financement]. S’il n’y a rien, le 17 mai prochain (Journée internationale de lutte contre l’homophobie et la transphobie), on planifiera d’autres actions ! »
À noter ici que la Montérégie a connu une augmentation fulgurante de la population au cours des dernières décennies, avec maintenant plus de 1,6 million d’habitants. Et on le redit, pour cette population, il n’y a que le JAG pour aider ces milliers de personnes LGBTQ+. Au moment où le JAG tenait sa conférence de presse à Saint-Hyacinthe, « la députée Jennifer Maccarone faisait une intervention à l’Assemblée nationale en appui au JAG et à la situation que l’on vit ici en Montérégie », indique le directeur général de cette association communautaire. Dans la même veine, le message de la directrice générale de la Table régionale des organismes communautaires et bénévoles de la Montérégie (TROC Montérégie), Johanne Nasstrom, était on ne peut plus clair : il faudrait que le gouvernement québécois investisse plus dans les ressources et les services pour cette région-là, « pour combattre la haine, les préjugés et les discriminations envers les personnes LGBTQ+ », note-t-elle avec vigueur.
« C’était la première édition de cette Journée arc-en-ciel, nous n’avons eu que de bons commentaires. Nous avons formé plusieurs centaines de personnes qui seront maintenant mieux outillées pour contrer l’homophobie et la transphobie [dans leurs organismes respectifs et dans la population]. C’est sûr qu’on va penser à une prochaine édition », de conclure Dominique Théberge.
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