Mercredi, 12 février 2025
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    Cruel Intentions (Un pari cruel): « Si tu veux me baiser, t’es mieux de pas m’fourrer »!

    La représentation des jeux de pouvoir n’a jamais connu un plus bel écrin que dans le roman épistolaire de Choderlos de Laclos, Les liaisons dangereuses, publié en 1782. L’ouvrage a donné lieu à de nombreuses adaptations au petit et au grand écran, et quoi de mieux que de transposer sa perfidie au cœur des fraternités et sororités étudiantes.

    La prémisse est similaire au film éponyme de 1999, mettant en vedette Ryan Phillippe et Sarah Michelle Gellar, et il ne faut pas s’en étonner puisque la série se veut une suite spirituelle. L’intrigue ne se déroule cependant plus dans une école secondaire, mais bien plutôt à l’université. Le choix de situer l’action dans le milieu des fraternités est ingénieux, puisqu’il permet d’y transposer les guerres de pouvoir, de même que les jeux de séduction et de violence psychologique et sexuelle du roman original.

    Caroline Merteuil (Sarah Catherine Hook) et Lucien Belmont (Zac Burgess) y incarnent deux demi-frère/sœur d’une famille de la haute bourgeoisie. Le maintien de leur réussite sociale est mis en péril lorsqu’une initiation tourne mal. Un étudiant est en effet blessé et un groupe d’agitateurs cherche à profiter de ce scandale pour trancher la tête de cette tradition poussiéreuse (le lien avec la Révolution française est un peu lourd, mais j’achète).

    Afin de préserver le statu quo, Caroline propose un pari à son demi-frère à la libido exacerbée : elle s’offrira à lui s’il couche avec Annie (Savannah Lee Smith), la fille du vice-président des États-Unis, et la convainc de joindre sa sororité. Elle peut également compter sur les services de CeCe (Sara Silva), une étudiante qu’elle traite comme une boniche de bas étage, ignorant qu’elle a elle-même succombé aux charmes du professeur Hank Chadwick (Sean Patrick Thomas). De son côté, Blaise (John Harlan) tente de camoufler sa gestion tarabiscotée des caisses de la fraternité tout en jonglant une relation équivoque avec Scott (Khobe Clarke) qui se déclare profondément hétéro, tout en adorant lui prodiguer des fellations.

    La série ne prétend évidemment pas surpasser le roman original (non plus que la splendide adaptation cinématographie réalisée par Stephen Frears, en 1988), mais s’amuse cependant avec ses codes et plusieurs y reconnaîtront le squelette de ses personnages emblématiques : Caroline Merteuil est, bien évidemment, la Marquise de Merteuil ; Lucien Belmont est le Vicomte de Valmont ; Annie Grover est Madame de Tourvel ; CeCe est Cécile Volanges ; Hank Chadwick est le Chevalier Danceny. Scott n’est par ailleurs pas sans rappeler Madame de Tourvel et Blaise, un mini Valmont.

    Malheureusement, la série ne mord jamais à fond dans la perfidie jouissive du roman original, ce qui lui enlève une bonne partie de son sel. Lucien y est éventuellement présenté comme une victime de sa sœur, alors que son cheminement devrait être beaucoup plus sinueux. Ajoutons que son interprète, Zac Burgess, dégage le charisme d’une poignée de porte et qu’il est donc bien difficile de croire en son pouvoir de séduction.

    Malgré tous ces bémols, Cruel Intentions offre son lot de bons moments, en particulier au regard de ses personnages périphériques, plus particulièrement la progression de CeCe, face aux intrigues de Caroline, et l’improbable duo formé par Blaise et Scott. Elle constitue sans aucun doute un plaisir coupable qu’on se surprend à visionner compulsivement, mais qui s’oublie tout aussitôt.

    Qui l’emportera au cœur de cette partie d’échecs ? Mystère puisque la première saison se termine sur plusieurs intrigues laissées en suspens. Ne serait-ce que pour satisfaire une curiosité dévorante relativement aux destins de CeCe, Blaise et Scott, on ne peut qu’espérer son renouvellement. Le doublage québécois comporte par ailleurs des perles savoureuses en alternant un langage soutenu avec des chapelets de jurons bien sentis, histoire de bien rendre les écarts de la version originale anglaise. C’est notamment le cas de Caroline, qui lance à Lucien un bien senti : « Si tu veux me baiser, t’es mieux de pas m’fourrer ! »!

    INFOS |Les huit épisodes de Cruel Intentions (Un pari cruel) sont disponibles, en anglais et dans deux excellents doublages français, dont un réalisé au Québec, sur Prime Vidéo.

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