Vendredi, 29 mars 2024
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    Tout le monde parle de Jamie

    Amazon Prime présente sur petit écran le film Everybody’s Talking About Jamie, une comédie musicale complètement déjantée articulée autour de Jamie New, qui vient tout juste de fêter ses 16 ans et entend bien tout faire pour réaliser son rêve. Quelle est cette ambition? La bande-annonce enlevante et déchainée est on ne peut plus claire à ce sujet : devenir drag queen!

    Alors que les professeurs de l’école secondaire ne cessent de rabâcher les oreilles des étudiants à l’effet qu’il faut cesser de rêver et plutôt planifier une carrière raisonnable, le jeune homme ne peut s’empêcher de laisser aller son imagination, ouvrant ainsi la voie à des numéros de danse et de musique irrésistibles.

    Réalisé de main de maitre par Jonathan Butterell, le scénario est basé sur la comédie musicale du même titre (paroles de Tom MacRae et musique de Dan Gillespie Sells), elle-même basée sur un documentaire de la BBC Three diffusé en 2011 : Jamie : Drag Queen at 16. Dès le départ, le film annonce d’ailleurs ses couleurs haut et fort : «Tout est vrai; on a simplement ajouté des chansons et de la danse.» Pour les curieux, le générique final présente d’ailleurs des images extraites du documentaire initial. Jamie, brillamment interprétée par Max Harwood, n’est pas seul face à l’adversité que forment les étudiants, professeurs et autres adultes qui ne voient dans son «plan de carrière» que chimères et affabulations.

    Il peut en effet compter sur le soutien indéfectible de sa mère (Sarah Lancashire, extrêmement nuancée), mais surtout de son amie Pritti (excellente Lauren Patel), également ostracisée à l’école en raison de sa religion musulmane. Le film commence le jour des 16 ans de Jamie. Son père fait de nouveau faux bond. Rien de neuf sous le soleil puisqu’il est absent depuis des années, ne pouvant faire face à un garçon qui correspond si peu à l’idéal masculin qu’il escomptait. La fête est donc assombrie jusqu’au moment où sa mère lui offre de vertigineux souliers à talons hauts rouges.

    Un accessoire vestimentaire et une couleur qui ne sont pas sans rappeler ceux portés par Dorothy dans Le magicien d’Oz et qui, à l’instar de Judy Garland, lui permettront de réaliser ses rêves. Dans sa progression vers le statut de drag queen, il pourra également compter sur le soutien d’un mentor inattendu : Loco Chanelle (Richard E. Grant). Celui-ci est cependant renversé par l’ambition de Jamie : se présenter sous son nouveau jour au bal des finissants de l’école. La vision de Jamie demeure cependant un peu naïve et Loco remet rapidement les pendules à l’heure. Être drag queen, c’est plus que porter des robes fabuleuses : les fards à paupières ne sont parfois ni plus ni moins qu’une peinture de guerre.

    Dans les années 80, Loco a été intimement lié à un militantisme revendicateur, mais a également été témoin des ravages du sida dans la communauté gaie. C’est par une chanson bouleversante This Was Me, montée sur des images d’archives, que l’artiste se remémore cette période à la fois excitante et tragique et que Jamie réalise qu’être drag queen signifie surtout de s’inscrire dans une culture qu’il doit s’approprier et nourrir à son tour. Comme il le dit si bien : «La drag n’est pas seulement une émission de télé, c’est avant tout une révolution!»

    Évidemment, rien ne se déroule comme prévu et Jamie, de même que Pritti, devront faire face à l’incompréhension, l’intolérance et le rejet. Mentionnons aussi que la relation complexe qu’entretient le jeune homme avec son père (Ralph Ineson) et sa mère est mise en scène avec brio et ne pourra laisser personne indifférente. Qui dit comédie musicale dit chansons et chorégraphies, et le film tient ses promesses à ce niveau puisque les numéros présentés se distinguent par la diversité des émotions qu’ils inspirent ainsi que par leur inventivité. Difficile également de demeurer insensible devant certaines scènes, qui sauront sans doute vous tirer quelques larmes.

    Il faut souligner l’adresse du réalisateur à présenter des numéros délirants et quasi féériques. C’est notamment le cas d’une scène de cafétéria qui fera sans doute école par la splendeur minimaliste d’une soudaine transformation en salle de bal, transportant littéralement les spectateurs dans un autre univers. Bref, c’est un rendez-vous cinématographique qui marie avec maestria la splendeur des codes de la comédie musicale, une part de drame, la mémoire de notre histoire collective et le bonheur d’une jeunesse à la fois impétueuse et rêveuse. Un incontournable! Comme le titre français l’indique, un doublage français des dialogues est disponible (Canada et France), de même qu’un sous-titrage général dans la langue de Molière qui rend fort bien l’intensité des chansons.


    INFOS | Everybody’s Talking About Jamie (Tout le monde parle de Jamie) /
    Jonathan Butterell. Amazon Prime, 2021. 115 minutes.

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