À son arrivée en poste à titre de nouveau chef du Parti libéral du Canada et, par conséquent, nouveau premier ministre du Canada, Mark Carney a rapidement annoncé vouloir procéder à un remaniement ministériel. Bien que ce remaniement nous semble davantage symbolique, puisque des élections seront vraisemblablement déclenchées dans quelques jours, nous étions avides de découvrir sa nouvelle composition, reflet des grandes orientations et priorités du nouveau chef du PLC. Nous étions notamment à l’affût de découvrir qui serait nommé à la tête du ministère Femmes et Égalité des genres Canada. Quelle ne fut donc pas notre surprise de découvrir sa totale absence au sein du Cabinet.
Est-il désormais relégué au ministère de la Famille? L’incrédulité et l’inquiétude se sont vite emparées de nos communautés. En ces temps particulièrement troubles pour les femmes et les personnes LGBTQ+, il nous apparaît pourtant essentiel de réitérer l’importance de la défense de nos droits au Canada.
À titre de rappel, Femmes et égalité des genres Canada défend les droits des femmes et des personnes LGBTQ+ depuis plusieurs années. On peut notamment lire sur leur site que le ministère est « engagé à faire avancer l’égalité en ce qui concerne le sexe, l’orientation sexuelle et l’identité ou l’expression de genre par l’inclusion des personnes de tous les genres, y compris les femmes, à la vie économique, sociale et politique du Canada. »
Le Plan fédéral 2ELGBTQI, lancé en 2022 par le ministère, avait notamment comme objectif l’intégration des enjeux LGBTQ+ aux travaux du gouvernement du Canada. L’absence actuelle d’une voix pour porter ces dossiers au sein du Cabinet semble contraire à cette promesse, et ajoute une couche d’incertitude dans un climat déjà précaire pour plusieurs organismes communautaires LGBTQ+. Dans un contexte où on voit les droits des femmes et des personnes LGBTQ+ reculer chez nos voisins du sud, il est scandaleux que le ministère Femmes et Égalité des genres Canada soit potentiellement annexé à un autre ministère ou pire, relégué aux oubliettes.
Les données montrent pourtant que la violence, l’intimidation et les discours haineux envers les femmes et les communautés LGBTQ+ pullulent comme jamais, tant en ligne que hors ligne. Les attaques envers nos communautés fusent de toutes parts.
Au Conseil québécois LGBT, nous sommes témoins au quotidien des répercussions de la montée de la haine qui érode le sentiment de sécurité et met en péril le bien-être et la dignité de nos communautés.
À ce titre, GRIS-Montréal publiait, au début de l’année, les résultats d’une étude qui faisait état d’une inquiétante montée de l’intolérance des jeunes envers les personnes LGBTQ+. Le niveau de malaise des jeunes face à l’homosexualité de leur meilleur·e ami·e est passé de 15,2 % à 33,8 % pour une amie lesbienne et de 24,7 % à 40,4 % pour un ami gai entre 2017 et 2024.
Interligne, en partenariat avec Léger, a également diffusé la semaine dernière les résultats d’un sondage national sur la santé mentale qui fait état d’enjeux réels et préoccupants. On y mentionne notamment que 86 % des personnes LGBTQ+ ont vécu au moins un défi de santé mentale dans la dernière année, comparativement à 64 % des personnes non-LGBTQ+.
Plus que jamais, nos communautés ont besoin d’un soutien actif du gouvernement canadien. Il lui faut assurer une surveillance accrue des crimes motivés par la haine, en considérant les répercussions spécifiques qu’ils ont sur les femmes et les communautés LGBTQ+.
En la potentielle absence de Femmes et Égalité des genres Canada d’ici les prochaines élections, qui assurera cette surveillance? Nos communautés ont besoin de réponses
Nous sommes conscient·es que d’aspirer à diriger une nation comporte différentes priorités, dont celle d’assurer sa santé économique. Mais derrière ce rôle, il y a également celui de protéger les valeurs de ce pays. Il nous apparaît ainsi fondamental que le gouvernement de Mark Carney prenne non seulement position sur ces enjeux, mais adopte également des actions conséquentes et cohérentes avec les valeurs encadrées par nos chartes des droits et libertés.
Mylène de Repentigny-Corbeil et Pascal Vaillancourt, Coprésident·es du Conseil québécois LGBT
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