Lundi, 24 mars 2025
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    40 ans de visibilité LGBTQ+  au grand écran (1991)

    Dans le cadre du 40e de Fugues, le rédacteur en chef du magazine propose sur le site web quelques films LGBTQ+ qui ont marqué à leur façon le 7e art. Voici quelques films de 1991…

    EDWARD II 
    de Derek Jarman (1991)

    Dans l’Angleterre de 1325, le roi Edward II préfère son beau favori, Gaveston, à son épouse Isabelle. Il couvre d’honneurs le premier et néglige la seconde. Mais celle-ci, alliée à son amant, complote pour détrôner le roi. Obligé d’exiler son grand amour puis contraint d’abdiquer, Edward II est emprisonné et exécuté d’une manière brutale… Œuvre majeure de Derek Jarman (Caravaggio, Jubilée…), cette adaptation d’une pièce de Christopher Marlowe est un grand film politique. Le cinéaste anglais utilise la tragédie de ce souverain dépossédé de son trône et assassiné en raison de sa passion homosexuelle comme une parabole contemporaine du sort fait aux homos. Que les militants du mouvement gai OutRage soient les seuls soutiens du roi n’est qu’un des exemples de cette manière de jouer des anachronismes dont Jarman use avec brio. Splendidement filmé, ce film en colère l’est aussi contre le sida qui ronge le réalisateur et qui l’emportera deux ans plus tard.


    NO SKIN OFF MY ASS 
    de Bruce LaBruce (1991)

    Un coiffeur efféminé rencontre un skinhead sexy dans un parc et propose de l’emmener chez lui pour lui faire prendre un bain et le séduire. Le skinhead se retrouve pris au piège et cède aux désirs sexuels du coiffeur… Pour ce premier long métrage, Bruce LaBruce s’est inspiré d’un film de Robert Altman « That Cold Day in the Park » (1959) dont il reprend la trame narrative tout en changeant le contexte : la femme bourgeoise devient un coiffeur efféminé joué par Bruce LaBruce lui-même et le garçon du parc est ici un jeune skin-head. On découvre ici le goût du réalisateur pour l’ironie, l’humour décalé et un romantisme premier degré affiché. À sa sortie, en 1991, le film devient rapidement un objet de culte et devient associé à l’ascension du mouvement punk-grunge, quand Kurt Cobain déclarera dans une interview que No Skin Off My Ass est son film préféré.


    POISON 
    de Todd Haynes (1991)

    Ce film-essai, vraiment intriguant, explore à travers trois histoires «la perception de ce qu’est la déviance», prenant des styles et des esthétiques différents. Dans «Héros», un garçon de 7 ans en arrive à tuer son beau-père. Alors que dans «Horror» un scientifique désireux de percer le mystère de la libido devient accidentellement un meurtrier à la libido insatiable. Et «Homo», en forme d’hommage à Jean Genet, raconte l’histoire d’amour entre deux prisonniers. L’ensemble hétéroclite pourra en rebuter certains, mais reste que le film a quelque chose de vraiment intéressant. Todd Haynes (à qui on doit également les films Carol, Far from Heaven, I’m not There, Safe, Dark Waters, Velvet Goldmine, etc.) a un vrai talent pour la mise en scène.


    100 DAYS BEFORE THE COMMAND / Sto dney do prikaza 
    de Hussein Erkenov (1991)

    À la fin de l’URSS, le quotidien de quelques jeunes soldats d’une caserne. Interdit en Russie depuis sa sortie, un court (65′) film de toute évidence inspiré par Tarkovski dont il reprend le rythme et le symbolisme. La dureté du service militaire et des rapports humains russes sont dénoncés par des séquences élégiaques qui orientent l’ensemble vers le film d’art et d’essai. L’homoérotisme ambiant n’a pas dû aider la réception à l’époque de ce film visuellement superbe.


    YOUNG SOUL REBELS
    d’Isaac Julien (1991)

    Juin 1977. L’été approche et Londres est à la veille des journées officielles de célébrations des 25 ans de règne d’Elizabeth II. Une nuit, TJ, jeune noir gai, est assassiné dans un parc. Chris et Caz, deux jeunes soulboys noirs qui le connaissaient, sont DJ et animent une émission pirate. À travers leurs tribulations et l’enquête sur la mort de TJ, Young Soul Rebels dresse le portrait d’une Angleterre explosive entre mouvements soul, punk, skin, montée du fascisme et célébration nationaliste.


    LE FESTIN NU / NAKED LUNCH 
    de David Cronenberg (1991)

    « Nothing is true ; everything is permitted »… La citation de William Burroughs qui ouvre l’adaptation de son livre culte par David Cronenberg contient plus qu’une vue morale héritée de Nietzsche. Elle est comme le paradigme de l’œuvre cinématographique, qui refuse toute scission nette entre le domaine du réel et celui de l’imaginaire, qui ne s’interdit rien, au mépris du bon goût de rigueur quand on adapte un monument littéraire. Cronenberg a eu l’idée brillante que plutôt que de retrancher, il en ajouterait. Décrivant sous la forme d’une autofiction psychédélique le sentiment d’isolement, de solitude et d’abandon de Burroughs en fuite à Tanger, il mêle au roman «Naked Lunch» des éléments d’«Exterminateur» (sur son job de tueur de cafards à Chicago alors qu’il était encore marié et pas encpore complètement sorti du placard) de «Queer» et de «Junkie», d’événements fondateurs de sa vie qu’il a abondamment commentés mais jamais réellement racontés… telle la mort de son épouse en jouant à “William Tell”, s’étant déroulée de la sidérante façon dont la décrit le film et ayant marqué pour lui le début d’une vie de fugitif et d’auteur rongé par la culpabilité. Un souci maniaque de la reconstitution d’époque côtoie des machines-insectes en manque d’affection et de poudre jaune, Ginsberg et Kerouac en compagnons de route de l’écrivain-mentor. C’est la rigueur du cinéaste qui permet la liberté de ton. Le résultat, fruit d’une collaboration étroite entre le cinéaste et l’écrivain (Burroughs a suivi activement l’écriture du script et le tournage), est un objet étrange, qui appartient finalement autant à l’un qu’à l’autre. Car le sujet de Naked Lunch-film c’est bien le processus créatif ayant abouti au livre… et partant de là, le rapport que l’image entretient à l’écrit, le pouvoir de la représentation confronté à celui de la parole et de l’écriture.


    The Blue Hour (1992) | MUBI

    THE BLUE HOUR 
    de Marcel Gisler (1991)

    Blue Hour est un film sur la solitude d’un jeune prostitué gai et sa relation naissante avec une voisine un peu volage. Théo est un très joli jeune homme à la personnalité douce et attachante qui vend son corps à des hommes qu’il rencontre par l’entremise d’annonces dans les journaux allemands. Ce film intime et modeste offre une image dure et honnête d’une amitité particulière qui unit deux personnes qui ont peu en commun si ce n’est un besoin d’intimité et de compréhension. 

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