Ripley : Dolce vita et meurtres de sang-froid

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Tiré du roman à succès de Patricia Highsmith, publié en 1955, la série Ripley nous fait suivre les machinations de Tom Ripley, un escroc de petite envergure, alors qu’il se réinvente et joue un habile jeu du chat et de la souris avec les proches de ses victimes et les forces de l’ordre. Le résultat est à la fois inquiétant et fascinant !

Le roman a déjà connu deux adaptations : Plein soleil, réalisée en 1960 et mettant en vedette Alain Delon et Maurice Ronet, et, en 1999, The Talented Mr. Ripley (Le talentueux M. Ripley, en VF, et L’énigmatique M. Ripley, en VQ) avec Matt Damon et Jude Law. Cette fois-ci, c’est au tour d’Andrew Scott (Sherlock, Fleabag), dans une production Showtime réalisée pour Netflix, d’endosser les atours d’un antihéros complexe à incarner puisqu’il suscite à la fois l’admiration et l’horreur. L’action se campe en 1961. Un riche industriel demande à Tom Ripley de se rendre en Italie afin de convaincre son fils Dickie (Johnny Flynn) de revenir aux États-Unis. Celui-ci accepte immédiatement, histoire d’échapper à sa misère, mais il cache cependant un double jeu puisqu’il a bien l’intention de s’incruster dans la vie du jeune homme et, pourquoi pas, d’y abandonner son passé.

Il faut dès le départ souligner le choix audacieux d’opter pour une photographie en noir et blanc qui, combinée à certaines prises de vue biscornues, offre des images d’une beauté saisissante tout en générant une impression de malaise. Ce choix esthétique magnifie une reconstitution d’époque soignée, l’élégance des quartiers chics, de même que le côté sordide de certains lieux où la crasse semble encore plus crasseuse. La série baigne également dans une trame musicale constituée des grands succès de la chanson pop italienne de l’époque.

Contrairement aux précédentes adaptations, le côté queer de Ripley est plus clairement établi, notamment au gré des regards qu’il jette aux hommes à la dérobée. Cette marginalité est accentuée du fait que, véritable poisson hors de l’eau, Ripley pénètre dans un univers dont il ignore tous les codes et où il doit faire semblant d’être ce qu’il n’est pas. Il est cependant doté d’un atout majeur : un grand sens de l’observation et des qualités de mimétisme impressionnantes.Alors qu’il met en place son entreprise de séduction, il affronte le regard scrutateur de Marge (Dakota Fanning), la petite amie en poste. Dickie, de son côté, perce rapidement l’hétérosexualité de pacotille de Ripley et s’esclaffe même ouvertement lorsque ce dernier mentionne « aimer les filles ». L’arrêt de mort de Dickie sonnera cependant le jour où il prononce (coïncidence ou ultime affront ?) des propos homophobes à l’endroit d’un groupe de culturistes.

Dans une scène d’une rare violence, Ripley élimine froidement le jeune homme et usurpe ensuite son identité. On sait que l’appétit vient en mangeant et, face à de nouvelles anicroches, il replonge avec flegme dans ses solutions meurtrières. La série ne ménage d’ailleurs pas le spectateur en présentant le dur labeur de chacun des crimes, ce qui les rend d’autant plus monstrueux de banalité. Le dernier épisode amène un retournement de situation particulièrement bien ficelé alors que Tom se transforme, devient à la fois remarquable et remarqué, et que l’on saisit la finesse de chacun des engrenages qu’il a mis en place.

Comble de l’ingéniosité, dans une œuvre en noir et blanc, il met en scène une utilisation diabolique des jeux d’ombre et de lumière pour échapper à l’inspecteur de police qui est à ses trousses. Malgré un déroulement un peu lent, la série constitue un véritable plaisir pour les yeux, tout en offrant des scènes saisissantes et percutantes ! Pour ceux et celles qui s’étonneraient de la présence de John Malkovich dans un passage éclair, il faut savoir que l’acteur a interprété ce même rôle dans Ripley’s Game (Ripley s’amuse en VQ), adaptation du troisième volume de la série de romans. La scène se veut une métaphore astucieuse où l’ancien Ripley passe le relais au nouveau, qui assume ainsi pleinement son identité criminelle.

INFOS | Les huit épisodes de Ripley sont disponibles sur Netflix en anglais et dans un excellent doublage français.

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