Mercredi, 14 mai 2025
• • •
    Publicité

    Autour de Truman Capote : “TRUMAN CAPOTE” de George Plimpton / “UN PLAISIR TROP BREF” de Truman Capote

    Gerald Clarke a publié en 1988 (en français, chez Gallimard, en 1990) la biographie – incontournable – sur Truman Capote, écrivain américain né à la Nouvelle-Orléans en 1924 et mort à Los Angeles en 1984. On pourrait dire que la biographie orale de George Plimpton, qui vient de paraître, est un complément à celle de Clarke. On y retrouve, même textuellement, des extraits du Capote de Clarke. On pourrait aussi dire qu’Un plaisir trop bref (lettres), ensemble épistolaire publié en français il y a environ deux ans, est également un autre complément.

    Ces échanges de Capote avec ses amis et le milieu littéraire américain, qui se sont poursuivis de 1939 à 1982, sont un vrai régal. Les lettres nous permettent d’approcher encore plus l’intimité de cet écrivain aussi léger qu’il pouvait être profond, de nous montrer un homme préoccupé avant tout par son travail, s’angoissant de ne pas avancer, doutant. 

    Elles nous donnent l’occasion de saisir ce qu’était la vie mondaine et littéraire du dernier demi-siècle, et un Capote qui veut absolument s’amuser, voyager, rencontrer des gens célèbres (il a fait des pieds et des mains pour devenir ami avec le photographe Cecil Beaton qui se targuait de ne fréquenter que des aristocrates). L’auteur de La Harpe d’herbes (1951) cherchait aussi, dans ses messages qui étaient toujours d’une grande chaleur, avec moult bisous et déclarations affectueuses, un réconfort. Il espérait également en retour des nouvelles et des commérages qui pouvaient nourrir son œuvre.

    La biographie inhabituelle de George Plimpton suit chronologiquement les faits et gestes de la vie de Capote, ses relations, ses connaissances proches et lointaines ses amis, ses amants. Malgré quelques propos sarcastiques – et parfois carrément infamants (comme celles de Gore Vidal) –, ce Truman Capote résume avec une empathie certaine une vie qui a commencé dans le fin fond du Sud des États-Unis pour se terminer tristement sur la Côte Ouest, à deux pas d’Hollywood.

    UN PLAISIR TROP BREF : LETTRES / Truman Capote

    Abandonné à cinq ans par sa mère, élevé par ses tantes, Truman Capote commence à écrire à l’âge de dix ans et publie sa première nouvelle à vingt ans. De très petite taille, avec une voix de fausset, cet homosexuel, qu’on prendra à tort pour un provocateur ou un frivole invétéré, se fait connaître dès son premier roman Les Domaines hantés (1948). Après le succès de Petit déjeuner chez Tiffany (1958), un changement de style radical marquera son écriture : Capote consacre presque sept années à De sang-froid (1965), une enquête pointilleuse et réaliste tirée d’un fait divers sanglant. Ce sera là le manifeste du «roman de non-fiction» qu’il élaborera et qui se terminera avec Prières exaucées, livre inachevé dont les extraits publiés en 1975 font scandale et éloignent Capote du milieu de la café society (c’est le nom qu’on donnait à l’époque à la jet society).

    Le livre de Plimpton s’attache autant au côté littéraire que social de Capote. Ceux qui admirent ses livres y trouveront l’essence ou la source de ce qui fait un écrivain. Les autres aimeront l’aspect piquant, voire vénéneux de cette bête sociale qui ne pouvait rester seule une minute – sauf pour écrire. Peut-être même, pourrions-nous conclure, que c’est cette gloire recherchée auprès des milieux fortunés et des gens célèbres qui a détruit la part créatrice de Capote. Il a toujours voulu grimper l’échelle sociale – et d’une certaine façon, il a réussi, comme l’a montré son fameux bal en noir et blanc de 1966. Il a dégringolé subitement, poussé certainement par un besoin de vérité, mais qu’on a pris pour un mélange de mépris, de mesquinerie et d’objectivité malsaine.

    Celui qui croyait faire pour l’Amérique ce que Proust a fait pour la France n’en demeure pas moins une figure éclatante du monde artistique et mondain newyorkais, un entertainer efficace et drôle. Il n’avait pas la langue dans sa poche et son imagination n’a jamais été en berne. C’était surtout un grand styliste, qu’il ne faudrait surtout pas oublier de lire.

    TRUMAN CAPOTE / George Plimpton, traduit de l’américain par Béatrice Vierne. Paris: Arléa, 2009. 449p.

    UN PLAISIR TROP BREF : LETTRES / Truman Capote, édité par Gerald Clark, traduit de l’américain par Jacques Tournier. Paris: 10/18, 2007. 511p.

    Du même auteur

    SUR LE MÊME SUJET

    LEAVE A REPLY

    Please enter your comment!
    Please enter your name here

    Publicité

    Actualités

    Les plus consultés cette semaine

    Publicité