La Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida (COCQ-SIDA) a tenu à rappeler que, comme pour l’épidémie de VIH/sida, la réponse à l’épidémie de COVID-19 doit se faire dans le respect des droits de la personne.
«Nous saluons la réponse jusqu’ici prompte et proportionnée du gouvernement face à la crise actuelle. Cependant, nous souhaitons émettre des réserves quant à sa mise en œuvre. Le 13 mars dernier, en déclarant l’état d’urgence sanitaire, le gouvernement du Québec se dotait de larges pouvoirs afin de protéger la santé de la population. Les forces policières ont eu le mandat d’appuyer le gouvernement et les autorités de santé publique dans l’application de ces mesures d’exception. Nous nous inquiétons de l’impact qu’aura ce rapprochement sur les communautés plus vulnérables et les personnes marginalisées.»
La COCQ-SIDA est notamment préoccupée par les récits de personnes en situation d’itinérance qui ont reçu des amendes élevées pour ne pas avoir respecté les consignes de distanciation physique. Mettre à l’amende des personnes qui n’ont ni les moyens de payer, ni d’autres alternatives, n’atténue en rien les inégalités et n’est pas un moyen d’endiguer la pandémie.
«Bien que les principales directives de la santé publique soient simples, toutes et tous n’ont pas la même capacité, ni les mêmes ressources, pour les mettre en œuvre», rappelle Me Léa Pelletier-Marcotte, coordonnatrice du programme Droits de la personne et VIH/sida à la Coalition. «Ces directives ne permettront pas de limiter la propagation du virus si rien n’est fait pour réduire les inégalités», poursuit l’avocate.
La Coalition est aussi alarmée par le fait que des intervenant.es œuvrant auprès de personnes vulnérables dans le contexte de la COVID-19 se soient fait imposer des amendes bien que leur travail constitue un service essentiel.
«L’expérience du VIH démontre qu’il est impératif de promouvoir la solidarité sociale, et d’impliquer les communautés dans la riposte à la COVID-19», fait valoir Ken Monteith, directeur général de la COCQ-SIDA. «Une implication des communautés assure une diffusion optimale des
messages auprès des populations clés et la mise en place de mesures adaptées à leurs besoins et leurs réalités. La police ne doit pas nuire à ces efforts en abusant des pouvoirs qui lui sont conférés», ajoute-t-il.
L’expérience du VIH a aussi démontré que le recours excessif au droit criminel ou aux sanctions pénales pour répondre à des enjeux de santé publique a des effets négatifs, tant sur l’efficacité des mesures de prévention que sur le respect des droits de la personne. La COCQ-SIDA est inquiète quant aux appels à recourir au droit criminel pour punir l’exposition au SARS-CoV-2, le virus qui cause la COVID-19.
Comme l’a rappelé l’ONUSIDA, le recours au droit criminel n’est pas une solution appropriée pour répondre à une épidémie: la criminalisation ne fait qu’alimenter les préjugés et la méfiance. Rien n’indique que la situation serait différente dans le cas de la COVID-19, laquelle exacerbe certaines inégalités économiques et sociales au même titre que le VIH.
Le contexte actuel nécessite une réponse de santépublique forte, mais cette réponse ne devrait pas ouvrir la porte aux abus, notamment en ce qui a trait à la limitation des libertés individuelles, aux sanctions et à l’incarcération.
La riposte à la COVID-19 nécessite que tous les niveaux de gouvernement unissent leurs efforts afin d’atténuer les conséquences humaines, sociales et économiques qui en découlent.
Pour de plus amples infos sur la COCQ-SIDA: cocqsida.com