Vendredi, 17 janvier 2025
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    Journée mondiale de lutte contre le sida –1er décembre 2024

    Chaque année, nous soulignons la Journée mondiale de lutte contre le sida en espérant que les nouvelles seront meilleures d’une année sur l’autre et que des progrès considérables auront été accomplis afin de conduire à l’éradication du virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Dans les quatre dernières décennies, les acquis ont certes été vertigineux par rapport à d’autres maladies, mais il reste encore des obstacles à surmonter pour mettre fin à l’épidémie du VIH. Et, sans surprise, ces obstacles sont directement liés aux iniquités sociales, en particulier en matière de santé et de droits humains.

    Qu’en est-il aujourd’hui ?
    Au niveau mondial, les données de 2022 et de 2023 de l’ONUSIDA demeurent stables : on estime que 39,9 millions de personnes vivent avec le VIH dans le monde, que 1,3 million de personnes sont infectées par le VIH chaque année et que 630 000 personnes par an décèdent de causes liées au sida. En revanche, au Québec, le portrait est différent. Avec 422 nouveaux cas déclarés en 2022, on note une augmentation de 78 % par rapport à l’année précédente. Plusieurs facteurs y contribuent, parmi lesquels la réouverture des frontières et l’augmentation du nombre de dépistages par rapport aux années de pandémie de COVID-19.

    Cependant, une constante demeure : les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HARSAH) représentent l’un des groupes les plus touchés par le VIH avec près de 40 % des nouveaux diagnostics, dont 61 % des cas ont été découverts lors d’un premier dépistage. Qu’est-ce que ces données nous amènent à penser ? On peut répéter ad vitam aeternam que l’absence d’éducation sexuelle dans les écoles et le manque de sensibilisation auprès de la population en général sont des raisons évidentes, mais on doit également reconnaître qu’il existe un relâchement dans la communauté LGBTQ2+ par rapport à l’urgence et à la nécessité de combattre le VIH. En témoigne notamment la diminution constante de l’intérêt autour de la Journée mondiale de lutte contre le sida, y compris au niveau international. Le VIH n’est plus à la mode et les jeunes générations ne se sentent pas
    concernées, d’autant moins que le discours ambiant laisse entendre que le VIH n’est plus un problème grave parce qu’il existe des médicaments. Effectivement, les traitements ralentissent la maladie qui est devenue une maladie chronique. Au niveau préventif, la prophylaxie préexposition (PrEP) évite de contracter le virus. Encore faut-il connaître son existence, y avoir accès et l’utiliser !

    La PrEP existe depuis plus de 10 ans déjà et elle diminue jusqu’à 97 % le risque de contracter le virus. Il s’agit donc d’une stratégie de prévention particulièrement efficace et constitue une avancée majeure en termes préventifs, mais son efficacité à réduire significativement la transmission du VIH est limitée par sa sous-utilisation. La sous-utilisation de la PrEP revient à ne pas utiliser un vaccin, s’il était disponible. C’est là, un échec de la santé publique.

    Pourtant, en l’absence de vaccin, la PrEP est un outil important pour contrôler l’épidémie d’infections au VIH, mais plusieurs facteurs limitent son accès. Les tabous associés à la sexualité empêchent plusieurs personnes d’en parler à leur médecin et vice-versa. L’absence de cours sur les ITSS dans le cursus médical ajoute à la méconnaissance et au malaise qui en découle : plusieurs résidents en stage à l’Actuel voient un cas de syphilis pour la première fois ! Finalement, des enjeux financiers peuvent restreindre l’accès à la PrEP : refus de remboursement de la part des compagnies d’assurance ou manque de moyens financiers pour assumer les coûts de la PrEP. À cet égard, l’Actuel a participé à une recherche démontrant que la gratuité de la PrEP réduit considérablement les barrières à son utilisation. À ce titre, la Grande-Bretagne fait figure de proue en rendant gratuite la PrEP depuis 2020, avec des résultats spectaculaires dans la diminution de la transmission du VIH. La PrEP est également gratuite dans six provinces canadiennes pour tous les résidents ou pour certaines populations à risque, qu’attendons-nous pour en faire autant ? Les traitements relatifs au VIH et à sa prévention doivent être gratuits comme pour les autres ITSS. La diminution du nombre de nouvelles infections est essentielle pour infléchir l’épidémie de façon significative, il s’agit donc d’un enjeu majeur de santé publique dont on doit tenir compte. Dans le contexte actuel de lutte contre le VIH qui présente de multiples défis, il est d’autant plus important d’appréhender le problème de façon intégrée. Bien que les données actuelles puissent être préoccupantes, l’arrivée de nouvelles thérapies de longue durée (tant thérapeutique que préventive) offrent des avenues prometteuses pour la gestion de la maladie et sa prévention. Aujourd’hui, les personnes vivant avec le VIH et les personnes sous PrEP consultent environ quatre fois par année, ce qui permet de faire leurs bilans sanguins et d’effectuer le dépistage des ITSS. Dans la mesure où la chlamydia et la gonorrhée ont augmenté respectivement de 11 % et de 21 % en une année, il est essentiel que la santé publique, de concert avec les médecins de première ligne et les organismes communautaires, déploient d’urgence les mesures appropriées pour implanter ces nouvelles thérapies de façon efficiente et sécuritaire dans une perspective de santé publique et de santé globale des personnes.

    « Suivons le chemin des droits » est le slogan de la Journée mondiale de lutte contre le sida cette année. Droit à l’équité sociale, à l’accès aux soins et à la non-discrimination, autant de facteurs qui exigent un engagement sur le long terme qui s’appuie sur approche multidisciplinaire. En ce sens, on ne peut qu’inciter la santé publique à jouer un rôle de leader dans cette démarche, afin de garantir que le VIH et les ITSS deviennent une priorité et pour veiller à ce que les batailles gagnées dans les dernières années, notamment concernant la réduction des méfaits, ne disparaissent pas en raison de réductions budgétaires. C’est cet engagement qui permettra de respecter « le chemin des droits ». À l’inverse, l’inaction conduira inévitablement à accroître les iniquités sociales et à fragiliser davantage des populations déjà hautement vulnérables.

    Dr Réjean Thomas
    Fondateur Président-directeur général Clinique médicale l’Actuel

    INFOS | Clinique médicale l’Actuel, 1001 Boul. de Maisonneuve E bureau 1130 11e étage,
    Montréal, QC H2L 4P9 / www.cliniquelactuel.com


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